par Ümit Dönmez
Un couvre-feu est instauré dans ce territoire français du Pacifique Sud pour contenir des manifestations violentes contre une réforme constitutionnelle.
Des troubles d'une «grande intensité» ont éclaté à Nouméa, en Nouvelle-Calédonie, suite à l'examen d'une réforme constitutionnelle à Paris, ce qui a conduit à l'instauration d'un couvre-feu par le haut-commissariat de la République. Les manifestations violentes ont débuté lundi, avec des véhicules incendiés et des pillages de magasins, en réponse à une réforme que les indépendantistes jugent défavorable aux intérêts kanaks.
Par voie d'un communiqué, le haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie a annoncé que le couvre-feu serait effectif de mardi 18 heures à mercredi 6 heures, et pourrait être prolongé si nécessaire. La mesure vise à rétablir l'ordre après que les manifestations ont pris une tournure violente avec des affrontements entre les forces de l'ordre et les manifestants.
Les émeutes ont été déclenchées par la mobilisation du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), qui s'oppose à une réforme visant à élargir le corps électoral pour les élections provinciales, selon le Huffington Post. «Cette réforme risque de minoriser encore plus le peuple autochtone kanak», a indiqué un porte-parole du FLNKS à la presse française.
En marge des protestations, des violences ont été rapportées avec des incendies volontaires, dont une grande usine d'embouteillage à l'entrée de Nouméa, totalement ravagée par les flammes lundi soir. Les forces de l'ordre ont également fait état de «nombreux blessés» dans leurs rangs et de l'arrestation de 36 manifestants, qui seront présentés à la justice.
Depuis le 4 mai, les indépendantistes ont intensifié leurs actions dans le cadre de l'opération «Dix jours pour Kanaky», rapporte Le Figaro. Le 13 avril, deux manifestations majeures ont rassemblé des milliers de personnes opposées et favorables à la réforme de la Constitution - environ 20 000 de chaque côté, d'après les forces de l'ordre. Cette mobilisation massive, sans précédent depuis quarante ans, s'est déroulée dans un archipel de 270 000 habitants. Cependant, les cortèges sont restés calmes.
Réforme constitutionnelle en Nouvelle-Calédonie
La réforme constitutionnelle, débattue à Paris pour la Nouvelle-Calédonie, propose de modifier les conditions d'accès au vote lors des élections provinciales et s'inscrit dans un climat tendu suite à trois référendums sur l'indépendance, tenus entre 2018 et 2021. Ces scrutins, remportés par les partisans du maintien dans la République française, ont exacerbé les tensions politiques locales. La principale modification envisagée consiste à élargir le corps électoral, une mesure qui suscite de vifs débats entre les différentes factions politiques de l'archipel. Les indépendantistes, majoritairement kanaks, perçoivent cette évolution comme une menace à leur représentativité, craignant d'être «noyés» dans un corps électoral élargi.
D'autre part, les loyalistes, soutenant une appartenance renforcée à la France, revendiquent une ouverture plus large du droit de vote pour garantir l'équité des droits civiques à l'ensemble des résidents de l'archipel. Selon eux, l'accès élargi au vote aux élections provinciales, qui sont les scrutins les plus influents localement, devrait refléter le principe d'égalité républicaine applicable sur le reste du territoire national français.
Les discussions autour de cette réforme constitutionnelle se déroulent dans un contexte où les équilibres politiques sont particulièrement fragiles. L'histoire récente de la Nouvelle-Calédonie, marquée par des accords visant à apaiser les tensions et à trouver un chemin commun entre indépendantistes et loyalistes, montre que toute modification du cadre légal doit être maniée avec prudence.
source : Agence Anadolu