23/08/2011 20 articles info-palestine.net  5min #56599

 L'otan à la conquête de Tripoli

L'après-kadhafi : des appétits à satisfaire, une transition compliquée et des orages annoncés avec Alger

Salem Ferdi

Les Occidentaux qui ont fait la guerre à Kadhafi au nom de l'humanité vont chercher à prendre des dividendes fossiles auprès d'un nouveau pouvoir à la configuration informe entre islamisme et fédération de tribus. Alger qui a choisi une position statique et n'a pas investi doit s'attendre à des relations orageuses avec les nouveaux dirigeants de la Libye.

La main-mise occidentale sur les ressources naturelles libyennes est LE problème auquel la population aura à faire face dans l'ère post-Khadafi - Photo : AFP

Le roi des rois a bien perdu son trône. Il l'avait perdu irrémédiablement le jour où il a fait un discours rageur appelant à traquer ceux qui se sont rebellés contre lui « zengua zengua »... En validant l'instauration d'une zone d'exclusion aérienne, le Conseil de sécurité avait scellé le sort du régime.

Ce n'était, au vu de la disproportion des moyens, qu'une question de temps.

Kadhafi qui a passé ses quarante ans de pouvoir, délirant, à se protéger n'a pas compris le grand signal que constituait le non recours au veto de la part de la Russie et de la Chine. Il a tenu six mois. On ne sera pas surpris d'apprendre - plus tard - que l'accélération de la donne sur le terrain a été non seulement le fruit d'une intensification des frappes aériennes de l'Otan mais également d'un engagement au sol des forces spéciales occidentales.

Cette intervention au sol aurait eu lieu à partir du 14 août dernier entraînant un changement qualitatif sur le terrain. Les choses sont devenues irréversibles à partir du 17 août. Mais ce n'est qu'un aspect historique anecdotique. Les puissances occidentales engagées dans la guerre contre Kadhafi ne pouvaient lui permettre de tenir et ne lui offraient pas de porte de sortie que celle de quitter le pouvoir. C'est désormais fait.

Retour sur investissement pour les Occidentaux

Il faut d'emblée noter que les puissances occidentales engagées dans la guerre vont peser sur le futur de la Libye. Il faudra sans doute surveiller la manière dont le retour sur investissement va se faire. Et dans la Libye, cela ne peut se faire que dans le secteur des hydrocarbures. Les actions des compagnies pétrolières britanniques et françaises ont pris des couleurs à la Bourse après la chute de Tripoli. C'est dire que les « marchés » savent que des dividendes vont être pris. Cela ne prend pas nécessairement l'apparence de grands contrats - encore qu'il y a des affaires à prendre pour reconstruire des infrastructures - mais le « nouveau » régime pourrait libéraliser davantage le cadre juridique en faveur des entreprises occidentales.

Dans ce cadre la France et la Grande- Bretagne - et bien entendu les Etats-Unis - qui ont couvé le Conseil national de transition ont de bonnes chances d'être les premiers et les mieux servis. Cela est de l'ordre du prévisible. Ce qui l'est moins est la configuration du prochain régime. On sait que la rébellion est composée - c'est l'aspect le plus visible - de gens du régime qui ont quitté le navire Kadhafi après la rébellion de Benghazi et la condamnation mondiale des vitupérations vengeresses de Kadhafi. L'aspect le moins visible est la présence très forte des islamistes qui sont les opposants historiques du régime.

Si les deux parties paraissent s'entendre sur le but évident de bouter dehors Kadhafi et sa progéniture, rien n'indique que cette entente est durable. L'assassinat du général Abdelfatah Younès dans des conditions toujours non élucidées serait, selon une version, une exécution menée par des islamistes contre un homme qui les a durement réprimés quand il officiait sous Kadhafi.

Le poids pour les islamistes

Dans un pays où les partis politiques ont été considérés comme un « fléau », il n'est pas sûr que les hommes du régime passés à Tripoli et mis en avant parce qu'ils parlent « bien l'anglais » feront le poids électoralement face aux islamistes. Ces derniers, très présents sur le terrain des combats, partent sans le défaut d'avoir été les servants de Kadhafi. La seule réponse évidente - et pas forcément efficace - aux islamistes serait de jouer sur la fibre tribale.

C'est d'ailleurs une donnée lourde avec laquelle il faudra compter et qui pourrait être, en fonction des distributions de pouvoir et de rentes, une source d'instabilité. Il n'est pas fortuit que l'Otan ait rappelé, hier, qu'elle allait continuer à appliquer sa mission de « protéger les civils ». Le nouveau régime sera placé sous surveillance occidentale... et la mise en avant d'un « risque islamiste » pourrait servir d'argument supplémentaire pour justifier, éventuellement, une présence physique. Le discours sur la menace d'AQMI formulé par les officiels algériens et non entendu jusque-là, pourrait soudainement être entendu et servir d'argument. Il est clair que la « transition » ne sera pas de tout repos dans la Libye débarrassée de Kadhafi. Et on peut s'attendre à ce que les relations de l'Algérie avec les nouveaux dirigeants libyens ne le soit pas non plus.

Des relations fraîches avec Alger

Alger, au nom de la non-ingérence, n'a eu aucun rôle actif dans la crise libyenne. On ne peut pas dire que l'action dans le cadre de l'Union africaine ait eu une quelconque incidence. Le gouvernement algérien, sans cesse accusé de soutenir Kadhafi, s'en est tenu à une application des décisions de l'Onu et à des mesures de sécurisation de la frontière avec la Libye (982 km !).

Aujourd'hui, qu'il le veuille ou non, le gouvernement algérien paraît avoir tablé - ce qui était pour le moins étonnant quand des forces aussi disproportionnées sont engagées avec le label onusien - sur une tenue du régime de Kadhafi. Il est hautement probable que les relations avec le nouveau régime seront dans le meilleur des cas des plus « fraîches » pour ne pas dire tendues. Sonatrach qui a quelques intérêts en Libye pourrait en subir les contrecoups. Mais il est vrai également qu'une frontière de près de 1000 km impose du réalisme à toutes les parties.

Pour l'instant, l'Algérie, à défaut d'un « investissement » politique précoce dans la crise libyenne en faveur de la population, est contrainte à observer et à... surveiller ses frontières. C'est d'ailleurs la seule chose qu'elle faisait d'ailleurs ces derniers mois. La non-ingérence était-elle de mise en Libye qui sur 982 km est une affaire intérieure algérienne.

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