par Al Manar
Dans une interview exclusive pour notre site alManar (version arabe), l'ambassadeur de Russie au Liban, Alexandre Sazbekin a assuré que "ce qui se passe en Syrie n'est pas une révolution".
« Des groupes armés sont apparus en marge du mouvement populaire en Syrie. Ces groupes n'ont cessé d'augmenter et cherchent à s'emparer du pouvoir et à renverser le régime, ils ne veulent pas des réformes démocratiques » a-t-il précisé.
Toutefois, l'ambassadeur russe a nié avoir des informations sur les parties qui financent ces groupes ou leur dépêchent des armes soulignant que « ses propos relèvent d'une analyse politique de la situation ».
Le diplomate russe a, par ailleurs indiqué que la Russie continuera d'utiliser son droit de veto face à toute résolution visant la Syrie, ajoutant que « Moscou tient compte des décisions de la Ligue arabe mais peut ne pas les adopter surtout si elles sont contraires aux intérêts russes dans la région » !
Et de poursuivre : « Si la Russie a pu utiliser son droit de veto, c'est pas parce que les autres parties n'ont pas réussi à nous convaincre du contraire. Il faut savoir que notre position est fondée sur ce nous avons vu en Syrie. Et donc notre opposition au projet de résolution comme à l'initiative arabe revient à ce que nous insistons à ce que le transfert du pouvoir en Syrie se réalise à travers des élections et par le choix du peuple syrien».
Et d'ajouter : « Notre position à l'égard de toute décision votée contre la Syrie se fonde sur plusieurs constantes: parvenir à un règlement politique pacifique de la crise syrienne, sans aucune ingérence extérieure, établir un dialogue global entre le régime et toutes les factions de l'opposition. Et puis, nous ne voyons pas un bon avenir pour la Syrie après le renversement du régime, au contraire, seule la mise en uvre de mesures de réforme et une nouvelle constitution et aussi des élections sont garants de l'avenir pour la Syrie ».
Concernant la mission des observateurs arabes, le diplomate russe estime qu'elle a joué un rôle positif grâce à sa présence en Syrie et qu'il était souhaitable de tenir compte de ses conclusions sur ce qui se passe en Syrie.
Et de poursuivre : « A travers nos contacts avec les Etats arabes et les pays du Golfe, nous essayons toujours de trouver un terrain d'entente avec eux. Ainsi, nous avons reçu à Moscou le ministre des Affaires étrangères du Bahreïn et le ministre des Affaires étrangères des Emirats arabes unis, et nous avons essayé de mettre l'accent sur la nécessité de faire cesser la violence et trouver une solution politique en Syrie".
Sans nommer le Qatar ou d'autres pays arabes, le diplomate russe n'a pas hésité à critiquer le rôle de « certains des médias dans la couverture des événements en Syrie au profit de certaines parties », ajoutant « nous travaillons par tous les moyens disponibles afin de clarifier la réalité de la situation en Syrie ».
Interrogé sur le rôle de la Russie dans la question libyenne par comparaison à son rôle dans la question syrienne, Alexandre Sazbekin a déclaré que la « Libye été la première expérience du genre dans les événements du printemps arabe. Et si la Russie s'est abstenue de voter c'est parce que nous pensions que la mise en uvre de l'embargo pourrait réduire le nombre de morts parmi les civils. Mais les autres parties ont abusé des pouvoirs qui leur étaient accordés par une décision de l'ONU, et donc l'opération de l'OTAN a effectuée contre la Libye alors la Russie y était opposée. C'était une mauvaise expérience. Et nous depuis le début, notre président Dimitri Medvedev a informé toutes les parties que la Russie refuse toute décision ou expérience comparable en Syrie ».
ll a accusé l'OTAN d'avoir détruit le pays, soulignant que l'ingérence extérieure a provoqué à une nouvelle détérioration de la Libye, puisque le chaos et les affrontements se poursuivent dans certaines régions.
Et de noter: « la Syrie est particulièrement importante pas seulement pour la Russie, mais tout autant au niveau international et régional. Sans nier nos relations amicales avec la Syrie, mais nous ne regardons pas le régime syrien comme un allié de la Russie. Depuis l'époque de l'Union soviétique, nous n'avons pas d' Etats-alliés, parce que la politique russe n'est plus fondée sur des alliances, mais sur le partenariat avec le plus grand nombre de pays. Par conséquent, nous soulignons que dans le cas de la Syrie, il ne s'agit pas de défendre le régime syrien, la légitimité internationale ».
Sur le dossier nucléaire iranien, le diplomate russe a insisté «sur un règlement politique et diplomatique de la question, estimant préférable pour toutes les parties de rester à l'écart de tout conflit militaire avec l'Iran, car une telle guerre provoquera des conséquences catastrophiques dans la région ».
Cela dit, Alexandre Sazbekin a écarté l'éventualité d'une guerre contre l'Iran, ajoutant que "cela ne signifie pas de ne pas rester prudent et de suivre comment les choses évoluent"».