Parti communiste des ouvriers de Tunisie حزب العمّال الشّيوعي التونسي
Edited by Fausto Giudice
Deux mois et demi sont passés depuis la glorieuse révolution du 14 janvier. Pendant cette période, le peuple a réalisé d'importants acquis grâce à sa lutte et ses sacrifices.
Après avoir fait chuter le dictateur et les deux gouvernements Ghanouchi, le peuple tunisien est parvenu à imposer sa revendication portant sur une assemblée constituante, la dissolution du "Rassemblement constitutionnel démocratique" et de la police politique. Il a aussi imposé de grands progrès sur le terrain des libertés d'expression, d'organisation, de réunion et de manifestation. Malgré tous ces acquis, la révolution demeure à mi-chemin, de grands périls la guettent et la menacent et grandissent jour après jour.
Le pouvoir n'est pas entre les mains du Peuple qui s'est soulevé contre la tyrannie, l'exploitation et la corruption, il est toujours détenu par les forces réactionnaires. Ces dernières tentent, par le biais de la présidence provisoire et le gouvernement de transition, de s'emparer de la révolution pour la réduire en un simple toilettage de l'ancien régime. Mbazaâ et Beji Kaïd Sebssi ne sont soumis à aucun contrôle, ils ont refusé de reconnaitre "le conseil national pour la protection de la révolution" pour échapper à toute contrôle, en contrepartie ils ont érigé une instance consultative dont ils ont désigné les membres.
Si Mbazaâ et Beji Kaïd Sebssi ont accepté l'élection d'une assemblée constituante, ils ont en outre fixé la date des élections sans prendre en considération les intérêts du peuple. D'un autre côté, la dissolution du RCD n'a pas empêché son retour sous couvert de nouveaux partis, les organisations qui lui sont liées continuent à exister (Union nationale de la femme tunisienne...). Il s'est avéré que la dissolution de la police politique est une disposition presque formelle, elle existe toujours, elle pratique la répression, la torture, la surveillance, les écoutes téléphoniques, les coupures d'internet. Certains de ses symboles, occupent de hautes fonctions au ministère de l'Intérieur, les responsables d'assassinats et de torture n'ont pas été inquiétés.
Le langage de la menace est réapparu comme lors de l'ère ancienne, au nom de « la lutte contre la violence et le désordre ». La police a réprimé des sit-in à la Kasbah et à Mahdia. Les discours manipulant l'aspiration des citoyennes et des citoyens à la sécurité se sont multipliés, au détriment des questions sociales et politiques, dans le but de détourner la révolution.
Malgré la suspension de la constitution, les lois liberticides sont toujours en vigueur : le code de la presse et les lois régissant les associations, les partis, les réunions, les manifestations. Ces lois auraient du être abrogées et remplacées par des décrets garantissant les libertés, afin d'éviter leur incidences fâcheuses sur notre peuple.
L'administration est toujours sous l'emprise des symboles « destouriens » de la tyrannie et de la corruption, qui sont entrain de revenir en force, à leurs postes dans les différents gouvernorats. Ils ont renoué avec leurs pratiques anciennes opprimant la population, marginalisant les comités de protection de la révolution locaux et régionaux, dans la perspective de les anéantir.
La situation dans les établissements économiques et financiers n'est guère différente, les responsables du pillage du peuple, complices de « la bande criminelle » préservent leur puissance comme si de rien n'était.
L'état de la justice, minée par la corruption, n'a pas changé non plus, situation confirmée par l'association des magistrats. Les médias sont encore sous le joug des commis du régime de Ben Ali et fonctionnent toujours selon les instructions. Il n'y a eu aucune avancée sur le plan des poursuites et de la condamnation des emblèmes de la tyrannie et de la corruption y compris les assassins des martyres de la révolution à Sidi Bouzid, Menzel Bouzayane, Regueb, Thala, Kasserine, Tunis et les autres régions. Des membres du cercle proche de Ben Ali ont refait surface pour poursuivre leurs activités de façon provocatrice.
Sur le plan socio-économique, le gouvernement transitoire ne manifeste aucune volonté de prendre des mesures urgentes, en cette période décisive, au profit des classes populaires. La grande majorité de la population, particulièrement dans les régions marginalisées, a le sentiment qu'aucun changement n'est intervenu dans leurs situations critiques. Le chômage et la cherté de la vie sévissent encore, les services publics continuent à se dégrader et le gouvernent ne donne aucun signe démontrant sa volonté de faire face à ces difficultés.
Le gouvernement n'a pas encore mis ses pendules à l'heure de la révolution, il n'a pas remis en cause la minorité qui a pratiqué les pillages en s'appuyant sur le despotisme.
Le gouvernement applique encore les termes du budget décidé par le dictateur Ben Ali en décembre dernier, où la priorité est donnée au remboursement de la dette extérieure contractée par l'ancien régime et pour financer son gigantesque appareil sécuritaire. Malgré son caractère provisoire, ce gouvernement ne s'est pas gêné pour souscrire de nouvelles dettes externes, alors qu'il n'a pris aucune mesure pour la baisse des prix y compris pour les produits et services qui étaient sous le monopole des membres de la bande régnante. Les familles des martyrs n'ont pas été indemnisées et aucune aide urgente n'a été fournie aux régions paupérisées...
Le gouvernement justifie son comportement en prétextant son caractère provisoire et en affirmant ne pas détenir « la baguette magique » pour régler tous les problèmes...
Pourtant, c'est bien le gouvernement qui freine la poursuite et le jugement de la bande des pilleurs de l'argent public, ainsi que la saisie de leurs biens. D'ailleurs, qu'est ce qui l'empêche de suspendre le remboursement de la dette pour un temps et en profiter pour régler les problèmes de notre peuple, comme cela a été le cas dans d'autres pays? Pourquoi les prix des denrées de base, de l'eau et de l'électricité ne baissent-ils pas? Pourquoi la redevance télé n'est-elle pas supprimée? Pourquoi, il ne fournit aucune aide aux habitants de Sidi Bouzid pour l'électrification de leurs puits? Pourquoi il n'est pas à l'écoute des propositions des enseignants pour permettre l'embauche des hauts diplômés chômeurs?
Si le Parti communiste des ouvriers de Tunisie insiste sur les dangers qui menacent la révolution, c'est pour assumer les responsabilités qui sont le siennes.
Le peuple a le droit d'utiliser tous les moyens légaux pour défendre sa révolution et ses acquis, pour faire face aux dangers qui la menacent, il est aussi habilité à lutter contre le gouvernement qui porte atteinte aux libertés et qui veut enfermer toutes actions à l'intérieur des seuls débats de « la haute instance ».
Cette période exige l'approfondissement du processus révolutionnaire, pour parvenir à son aboutissement :
-1- Le maintien du Conseil national pour la protection de la révolution, comme un outil pour contrôler la présidence provisoire et le gouvernement transitoire et veiller sur la période transitoire.
-2- Le report de l'élection de l'Assemblée constituante après l'été, pour permettre au peuple le choix conscient et aux forces politiques une bonne préparation.
-3- Empêcher les pivots du RCD de s'organiser dans de nouveaux partis.
-4- La dissolution effective et de façon transparente de la police politique, ainsi que la poursuite des donneurs d'ordre et des auteurs de la torture, des assassinats et du pillage.
-5- Assainir l'administration publique et semi-publique de la corruption et des symboles de la répression.
-6- Assainir l'institution judiciaire et permettre aux magistrats d'élire leur conseil supérieur.
-7- Assainir le secteur médiatique des figures de l'ère révolue.
-8- Abroger des lois répressives et respecter les droits du peuple à la liberté d'expression, de réunion et de manifestation.
-9- Livrer, urgemment, les assassins des martyrs et les responsables des crimes commis contre le peuple, juger les figures de l'ancien régime, saisir leurs biens et récupérer leurs fortunes placées à l'étranger.
-10- Suspendre le remboursement de la dette extérieure pendant trois ans et la consacrer à la création d'emplois et au développement des régions marginalisées. S'abstenir de contracter de nouveaux prêts qui seront aux dépens de l'indépendance de notre pays.
-11- Baisser les prix des produits de consommation de base, de l'eau, de l'électricité, du gaz et la suppression de la redevance de télévision.
-12- Indemniser en urgence les familles des martyrs et les victimes de la répression et du pillage pendant la révolution et pendant les évènements du bassin minier, de Benguerdane, etc.
Courtesy of PCOT
Source: albadil.org
Publication date of original article: 31/03/2011
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