Environ un million de personnes se sont réunies pour la « marche prévue de million » dans la capitale égyptienne, réclamant la démission d'Hosni Mubarak
Al Jazeera
Une manifestation historique. Le 1° février 2011 restera longtemps dans les mémoires. Les jours de Moubarak devraient être comptés... - Photo : AP/Khalil Hamra
Dans le même temps, un des partis les plus anciens en l'Egypte, le Wafd, a annoncé ce mardi qu'un certain nombre de groupes de l'opposition avaient acceptent de former « un Front national » pour tenter de gérer la situation volatile. Dans une déclaration, le Wafd a fait savoir que le président Mubarak « a perdu toute légitimité. »
Également ce mardi, l'organisation des Frères Musulmans, un mouvement officiellement interdit mais toléré, a dit qu'elle ne discutera pas avec Mubarak ou son gouvernement.
Plus tôt, quelques partis d'opposition ont réclamé que Mubarak délègue ses responsabilités au vice-président nouvellement désigné Omar Suleiman, avec qui ils sont prêts à entrer en pourparlers.
Une foule de manifestants
Les milliers de manifestants ont commencé à se réunir tôt mardi matin sur la Place de Tahrir au Caire, qui a été le point focal des protestations dans la capitale et a servi de lieu de rassemblement de la marche, ce huitième jour d'un soulèvement qui a jusqu'ici coûté la vie à plus de 125 personnes.
Une autre marche forte d'un million de participants est prévue dans ville méditerranéenne d'Alexandrie, où des services nationaux de trains ont été annulés dans une volonté apparente d'entraver les manifestations. Des manifestations ont également lieu dans la ville de Suez.
Les organisateurs de la manifestation ont lancé le mot d'ordre d'une grève illimitée à travers le pays.
Les soldats sur la Place de Tahrir ont formé une chaîne humaine autour des manifestants, et vérifient que personne n'entre sur la place avec des armes. Des tanks ont été disposés près de la place, et les officiers ont vérifié les pièces d'identité.
L'armée a également bloqué toutes les voies principales dans la ville, et des dizaines de milliers de manifestants sont retenus au pont de Kasr l'Al-Nil. Ils étaient en route pour se joindre à la manifestation principale sur la Place de Tahrir.
« Montée en puissance »
Les correspondants d'Al Jazeera ont décrit une atmosphère « de festival » et « communautaire » à la manifestation, avec des participants appartenant à toutes les conditions sociales.
« Il est paisible, le pouvoir du peuple qui s'est réuni ici dans le coeur historique de l'Egypte, » a rapporté un correspondant.
Une autre correspondante d'Al Jazeera au Caire a dit qu'il y avait des informations selon lesquelles « des voyous dans certaines parties de la ville avaient essayé d'arrêter des personnes voulant se déplacer dans le Caire ».
Elle a dit aussi que « des poches de manifestants pro-gouvernementaux » se trouvaient à divers emplacements dans la ville. Il y a des craintes que si les deux manifestations se rencontrent, un affrontement violent puisse éclater.
Gigi Ibrahim, une militante politique qui participe au rassemblement, a indiqué à Al Jazeera que les protestataires ne seront pas satisfaits tant que Mubarak sera en place.
« Je pense qu'aujourd'hui il y a un très grand nombre de gens dans la rue... que chaque jour nous sommes plus nombreux que la veille. Je pense que les manifestations s'accélèrent. Le peuple... ne cédera littéralement pas jusqu'à ce que Mubarak soit parti, » dit-elle.
Afin d'essayer de décourager les gens de participer aux manifestations, la télévision d'état égyptienne leur a demandé de rester chez eux, les avertissant de la violence possible.
Un reporter d'Al Jazeera au Caire a dit que si la manifestation d'aujourd'hui n'allait pas comme prévu, des manifestations semblables pourraient être organisées pour vendredi.
Des rassemblements ont également eu lieu dans les villes de Mansoura, Damnhour, Arish, Tanta et El-Mahalla El-Kubra.
Les manifestations ont lieu alors que la police est de retour dans les rues.
Mais tandis que la posture que va adopter la police face aux grèves et aux rassemblements reste inconnue, l'armée égyptienne a clairement indiqué lundi qu'elle ne réprimerait pas les manifestations.
Face à la perspective d'un nombre considérable de personnes voulant converger sur la capitale, les autorités égyptiennes ont annulé toute circulation des trains, avec effet immédiat dès lundi après-midi.
Et la compagnie aérienne EgyptAir a dit qu'elle annulait tous les vols intérieurs et internationaux à partir de 15 heures (1300 GMT) jusqu'à à 8 heures (0600 GMT), jusqu'à nouvel ordre, coïncidant ainsi avec le couvre-feu décrété au Caire, à Alexandrie et à Suez.
Engagement de l'armée
Dans un communiqué publié lundi, l'armée a déclaré : « la liberté d'expression » a été garanti à tous les citoyens par des moyens pacifiques.
« Au grand peuple d'Egypte, vos forces armées, reconnaissant les droits légitimes du peuple », dit le communiqué, « n'ont pas utilisé et n'utiliseront pas la force contre le peuple égyptien ».
C'était la première confirmation explicite par l'armée qu'elle ne tirerait pas sur les manifestants qui ont pris les rues d'Egypte, et elle survient un jour avant le mardi de « la Marche par Millions ».
« La présence de l'armée dans les rues est pour vous et pour assurer votre sécurité et votre bien-être. Les forces armées ne vont pas recourir à l'utilisation de la force contre notre grand peuple. »
« Vos forces armées, qui sont conscientes de la légitimité de vos demandes et sont déterminées à assumer leurs responsabilités dans la protection de la nation et des citoyens, affirment que la liberté d'expression par des moyens pacifiques est garantie à tout le monde. »
Le même communiqué a exhorté les gens à ne pas recourir à des actes de sabotage qui violent la sécurité et détruisent les biens publics et privés. Il a averti qu'il ne permettrait pas que l'on pille, que l'on attaque et « terrorise les citoyens ».
Scènes de chaos
Ce mardi, alors même que l'Egypte continue de subir les contrecoups de la crise économique à la suite des manifestations, le FMI [Fonds monétaire international] a déclaré qu'il était prêt à mettre en place une politique de reconstruction économique du pays [ces vautours du FMI sont certainement la dernière chose à accueillir à nouveau en Egypte aujourd'hui - N.d.T].
Pendant ce temps, la désorganisation a été signalée à l'aéroport international du Caire, où des milliers d'étrangers tentent d'être évacués vers leurs pays d'origine.
Notre correspondante a rapporté mardi que près de 1000 citoyens américains ont été évacués vers Chypre ou la Turquie, d'où ils sont censés voyager par leurs propres moyens.
Elle a également déclaré que la Chine va envoyer deux avions supplémentaires pour évacuer ses citoyens.
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