© Ludovic MARIN Source: AFP
Le président français Emmanuel Macron inaugure le 60e Salon international de l'agriculture, au parc des expositions de la porte de Versailles, à Paris, le 24 février 2024.
Après les heurts matinaux entre forces de l'ordre et agriculteurs, le plus grand salon agricole de France, qui doit accueillir 600 000 visiteurs en neuf jours, a finalement été inauguré en début d'après-midi. «Macron démission», «fumier», «barre-toi», ont été entendus notamment des journalistes de l'AFP au moment où le président a officiellement coupé le ruban.
Comme il l'avait promis, le président a commencé à cheminer dans les allées en prenant le temps de dialoguer avec agriculteurs et exposants. Dans une salle sécurisée, Emmanuel Macron avait auparavant recueilli les doléances d'agriculteurs de trois organisations syndicales, la FNSEA, les Jeunes agriculteurs et la Coordination rurale, dont les membres aux bonnets jaunes s'étaient confrontés dans la matinée avec le service d'ordre du salon.
«Le boulot est fait sur le terrain, on a repris les copies, on est en train de faire toute la simplification», s'est-il défendu après avoir tombé la veste. «Je préfère toujours le dialogue à la confrontation», a assuré le chef de l'État, ajoutant : «il faut que le salon se passe bien parce que pour vos collègues, c'est parfois des mois, voire des années de boulot. Ils sont montés avec leurs bêtes, avec leur travail pour le montrer». «La ferme France reste forte, c'est faux de dire qu'elle est en train de se casser la gueule», a-t-il aussi affirmé, au bout de trois quarts d'heure d'un questions-réponses improvisé.
Le calme est revenu dans le pavillon principal du salon, celui où vaches, cochons et chèvres sont exposés, qui a ouvert au public en fin de matinée, donnant lieu à des scènes étonnantes d'enfants goûtant du fromage devant un stand à quelques mètres de policiers casqués. «Il y avait des policiers partout, ambiance de forteresse assiégée», a regretté Sophie Sucurovski, 28 ans, venue du nord de la France avec son fils de deux ans.
Face aux agriculteurs, Emmanuel Macron annonce un «prix plancher»
Des centaines de manifestants exaspérés sont entrés en forçant une grille vers 8h00 locales, une heure avant l'ouverture officielle prévue, et ont affronté le service d'ordre du Salon. De nombreux policiers ont ensuite été déployés à l'intérieur et les manifestants ont pu être contenus dans une ambiance de sifflets et de huées assourdissants.
«Macron démission!», «la chasse au Macron est ouverte!», «il est où?» scandaient des agriculteurs au moment où le président commençait sa journée par un petit-déjeuner avec les dirigeants de syndicats agricoles dans une pièce à l'abri des sifflets.
Plusieurs annonces ont été faites aux syndicats qui restent à préciser, dont la création d'un «prix plancher» pour mieux rémunérer les agriculteurs, le recensement des exploitations nécessitant des aides de trésorerie d'urgence, et l'inscription dans la loi que l'agriculture et l'alimentation représentent «un intérêt général majeur de la nation française.»
«Poser le mot sur le concept de prix plancher est déjà une petite révolution», a salué auprès de l'AFP la porte-parole de la Confédération paysanne, syndicat opposé à l'agriculture intensive, Laurence Marandola.
Les présidents français passent généralement des heures, voire la journée entière, au Salon, et les incidents ne sont pas inhabituels. Nicolas Sarkozy a lancé son célèbre «Casse-toi, pauvre con!» en 2008 à un jeune homme qui refusait de lui serrer la main. François Hollande a été hué et insulté par des éleveurs en 2016.
La crise qui couvait depuis l'automne a explosé le 18 janvier, menant à deux semaines de blocages d'autoroutes finalement levés le 1er février.
Dans les grandes cultures céréalières, les adhérents des syndicats majoritaires avaient été furieux d'apprendre le 23 février que la présidence française avait cité le collectif écologiste radical des Soulèvements de la Terre parmi les possibles participants à un «grand débat» ce 24 février voulu par le président, une invitation finalement annulée devant la bronca qu'elle a suscité.
Visiblement en colère, Emmanuel Macron a affirmé ce 24 février n'avoir «jamais songé initier» une invitation à ce collectif que le gouvernement a échoué à dissoudre.