par Manlio Dinucci
Accueillie à l'aéroport de Tripoli par une foule de miliciens au cri de « Allah Akbar », la secrétaire d'Etat Hillary Clinton s'est dite « fière de poser le pied sur le sol d'une Libye libre ». Donc, après avoir rencontré le président du Cnt Mustapha Abdel Jalil, elle a tenu une conférence de presse dans un centre islamique pour préciser de quelle manière les Etats-Unis entendent contribuer à l'avenir du pays. Avant tout l'OTAN continuera à « protéger les civils libyens tant que n'aura pas cessé le danger constitué par Kadhafi et ses acolytes ». Les termes temporels sont assez vagues : selon un haut fonctionnaire de la suite de Clinton, Kadhafi et les siens sont restés un « élément létal de troubles » qui pourrait bloquer l'évolution du pays. Ceci signifie que l'OTAN se prépare à surveiller la Libye avec ses propres forces militaires.
Clinton a ainsi abordé le thème de la reconstruction économique, en soulignant que la Libye a « la chance de posséder des richesses et des ressources ». Ce dont elle a besoin ce sont des « expertises et une assistance technique internationales ». Dans ce but sera créé un comité conjoint étasunien-libyen, pour définir les priorités du pays. Tout comme ils sont en train de le faire en Tunisie et en Egypte, les Etats-Unis établiront un partenariat avec la Libye, pour renforcer le commerce, les investissements et les liens entre les entreprises des deux pays et intégrer plus étroitement la Libye dans les marchés globaux. Le programme ne laisse pas de doutes : les Etats-Unis, en passant par-dessus les autres « amis de la Libye » parmi lesquels l'Italie, ont l'intention d'amener le pays africain dans leur sphère de domination économique.
C'est dans ce cadre que s'insère l'« assistance économique » à la Libye. Jusqu'à présent, a admis Clinton, elle a été relativement maigre, à cause de la politique d'austérité et d'une forte opposition du Congrès. De février jusqu'à maintenant les Usa ont fourni au Cnt des aides d'un montant de 135 millions de dollars. Bien peu de choses, si on considère que les fonds souverains libyens congelés en février dernier dans des banques étasuniennes (par une opération qui, dans le code pénal, s'appelle « rapine à main armée ») se montent à environ 32 milliards de dollars. Le Trésor Usa l'a qualifiée de « plus grosse somme d'argent jamais bloquée aux Etats-Unis », s'engageant à la garder « en dépôt pour l'avenir de la Libye ». Jusqu'à présent cependant il l'a gardée bien étroitement : ce que Washington a donné au Cnt se monte à 0,4% des capitaux libyens confisqués. A Tripoli, Clinton a annoncé que « nous sommes en train de travailler pour restituer des milliards de dollars des capitaux congelés ». Quand et dans quelle mesure, cela dépend clairement de la disponibilité du nouveau gouvernement libyen à ouvrir les portes du pays aux multinationales étasuniennes et à mettre l'économie sous la supervision de Washington, soit directement soit à travers le Fonds monétaire international.
En fonction de ce plan, Clinton annonce qu'allait être doublé le nombre d'étudiants libyens formés aux Etats-Unis avec le programme Fulbright et que seront ouverts dans toute la Libye de nouveaux cours de langue anglaise avec des enseignants étasuniens. Ce seront des écoles non seulement de langue mais aussi de démocratie : ceci étant garanti par le fait que « le Gouvernement des Etats-Unis soutient les droits humains partout et pour quiconque ».
Edition de jeudi 20 octobre 2011 de il manifesto
Traduit de l'italien par Marie-Ange Patrizio