Un papier du Black Star News qui a capté mon attention. Cet article présente l'intérêt de nous rappeler les enjeux matériels (hydrocarbures) des opérations de l'OTAN en Libye, mais surtout de les situer dans le contexte de l'histoire africaine contemporaine. Car ce qui vient de se passer en Libye n'est pas un fait inédit : des puissances étrangères agissant parfois en ligues pour se débarrasser d'un potentat gênant. Le prétexte humanitaire n'est pas non plus une nouveauté, pas plus que l'hypocrisie du discours occidental.
On a l'impression que l'histoire bégaie. En fait, nous sommes plutôt dans une nouvelle phase de l'impérialisme occidental qui s'est assigné la mission absolument stratégique de contenir l'expansion chinoise ou de tout autre concurrent pour la domination du monde. Ce qui se joue ici, c'est la pérennité du leadership des Etats Unis et on pourra dire que ces derniers n'ont pas été déçus par leurs supplétifs européens. Ce n'est quand même pas pour rien que les Occidentaux ont fait ce qu'il fallait pour tenir à l'écart l'Union Africaine après avoir mis en avant une Ligue Arabe discréditée servant de vitrine diplomatique aux monarchies rétrogrades du Moyen Orient.
Le comble de tout cela, c'est que tout en sachant, en exposant le rôle absolument décisif des forces militaires de l'OTAN (près de 20 000 sorties aériennes), il est de bon ton de saluer la victoire des rebelles !
Or, il n'y a pas de victoire des rebelles, mais victoire de l'OTAN et c'est donc cette organisation qui décidera du destin de la Libye et de ses ressources. Exactement comme elle a décidé de ce que serait le sort des armes.
En conclusion, l'article invoque les mânes de Kwame Nkrumah, un de ces grands hommes qu'a enfanté l'Afrique. Il est clair que Mouammar Kadhafi était inspiré directement par la vision unitaire de Nkrumah. Une vision qui se voulait optimiste mais par trop idéaliste comme Nkrumah, avant Kadhafi, l'apprendra à ses dépends et à ceux de son pays.
Pour l'heure, les économies africaines (et arabes) sont trop dépendantes du monde occidental pour qu'une intégration africaine (ou régionale en Afrique) soit vraiment possible, sauf peut-être en Afrique australe où l'Afrique du Sud pourrait avoir la capacité d'entraîner économiquement et politiquement toute la sous-région.
On notera d'ailleurs dans cette affaire que les Etats d'Afrique sub-saharienne ont eu un comportement souvent honorable. On n'en dira pas tant des pays arabes qui devront boire le calice jusqu'à la lie.
L'heure de gloire de la Libye... Alors que l'OTAN accélère sa conquête
Black Star News (USA) 21 août 2011 traduit de l'anglais par Djazaïri
Il y a plus d'un siècle, les envahisseurs Italiens avaient fauché les Ethiopiens, des civils en majorité et obtenu la soumission de l'empereur Menelik II.
Les journaux de ce jour là, dont le New York Times, avaient célébré la "grande victoire de l'Italie" en Afrique, expliquant que la défaite des Abyssins signifiait que la "civilisation" avait prévalu sur la "barbarie." L'Afrique s'ouvrirait désormais à un commerce profitable avec l'occident, telle était l'opinion du New York Times.
Puis, en 1896, Menelik II conduisant les attaques avec l'impératrice Taytu, frappe avec courage et une puissance féroce, détruisit l'ensemble du corps d'armée italien, 10 000 hommes, en éliminant la moitié, dont la plupart des officiers supérieurs et capturant l'autre moitié.
Ce fut la plus grande heure de gloire de l'Ethiopie et, de fait, le meilleur moment de l'Afrique face à l'agression impérialiste européenne. Le général Oreste Baratieri, le comandant de l'armée italienne, fut pas la suite traduit en cour martiale en Italie et accusé de lâcheté pour la défaite. Aujourd'hui, les forces de l'OTAN, qui comprennent l'Italie, s'attellent à nouveau à la conquête et s'apprêtent à prendre le contrôle de la Libye via leurs hommes de paille «rebelles» et de ses immenses richesses pétrolières - plus de 44 milliards de barils de réserves prouvées - et de grandes quantités de gaz naturel.
L'Italie a aussi été autrefois la puissance coloniale en Libye où, en tant que puissance occupant, elle s'était livrée au génocide des Libyens. Les Libyens résistèrent vaillamment sous la direction d'Omar Mokhtar qui sera capturé et exécuté. Les Italiens seront finalement expulses [par les Anglais, NdT]. Mouammar Kadhafi pourrait connaître un sort semblable, peut-être de la main des "rebelles" de l'OTAN.
L'Italie est revenue avec ses allies européens et les Etats Unis, avides des vastes richesses du pays. La Libye est si riche que chaque foyer pourrait toucher un chèque de plus de 2 millions de dollars si toues les réserves de gaz et de pétrole étaient vendus aux cours actuels.
C'est la véritable raison pour laquelle le président US Barack Obama, le premier ministre Britannique David Cameron et le président Français Nicolas Sarkozy étaient déterminés à évincer Mouammar Kadhafi et même à ce qu'il soit tué. Si ces dirigeants Occidentaux s'intéressaient tant aux vies africaines, l'OTAN aurait fait la guerre contre les Shabab en Somalie. Les dirigeants occidentaux tiennent les Shabab pour responsables de la situation politique qui a laissé la Somalie incapable de faire face à la famine qui sévit dans ce pays. Des dizaines de milliers de Somaliens risquent de mourir de faim.
De même, pourquoi l'OTAN, si elle s'est donnée pour mission de sauver des vies africaines, n'a-t-elle pas mené une guerre contre les armées du Rwanda et de l'Ouganda er leurs milices allies qui ont causé la mort de 7 millions de Congolaises et de Congolais depuis 1997 et qui ont aussi violé des dizaines de milliers d'hommes et de femmes ?
La guerre d'agression de l'OTAN en Libye est devenue claire quand le chef du Conseil National de Transition à Benghazi, Mustapha Abdel Jalil, a déclaré au Financial Times que les concessions pétrolières post-Kadhafi seraient allouées sur la base du niveau d'aide que chaque pays a donné aux soi-disant « rebelles » pour déposer Kadhafi.
L'invitation au pillage était si flagrante qu'elle n'a pas échappé au Russe Vladimir Poutine quand il a qualifié l'invasion de l'OTAN d'appel à la croisade médiévale contre la Libye. La maximisation des destructions par l'OTAN s'est peut-être faite avec l'arrière-pensée de futurs contrats de reconstruction pour les pays occidentaux.
Les bombardements de l'OTAN ont connu une escalade après la signature conjointe par le premier ministre Cameron et les présidents Sarkozy et Obama d'une lettre ouverte parue entre autres dans le New York Times - qui comme il l'avait fait au 19 ème siècle continue à applaudir à la guerre en Afrique. La lettre ouverte disait entre autres choses que Kadhafi « doit partir » et « partir pour de bon. » Dans son essence, c'était une fatwa. Ensuite, l'OTAN avait commencé à bombarder les résidences de Kadhafi, tuant un de ses fils et trois de ses petits enfants. Ces dernières semaines, l'OTAN n'a même pas fait semblant de vouloir "sauver" des civils innocents.
L'OTAN a été responsable de ce que le député US Dennis Kucinih a caractérisé comme de possible "crimes de guerre" en Libye. Le député Kucinih a écrit une lettre à la Cour Pénale Internationale (CPI) pour demander que la cour enquête sur le commandement de l'(OTAN.
Un soulèvement interne authentique et légitime est une chose, une "rébellion" financée par l'OTAN et l'occident est une monstruosité de plus, qui usurpe et pervertit une insurrection endogène. L'OTAN a maintenant un chèque en blanc en Libye.
Alors que les media ont concentré leurs informations sur les excès commis par l'armée libyenne, les violations des droits de l'homme commises par les "rebelles" ont pourtant été signalées tout au long du conflit: des lynchages et des décapitations, entre autres de Libyens noirs, et le nettoyage ethnique de toute la population noire de Misurata rapportée par le Wall Street Journal le 21 juin 2011 et ignoré par CNN comme par le New York Times.
En fait, c'est après l'assassinat du général Younes, alors que la rébellion semblait en déconfiture, que l'OTAN a pris le contrôle complet des combats. Les grands media, comme le New York Times, ont ignoré les atrocités commises par les "rebelles" pour ne pas "ternir" leur image; les media ont donc préféré ignorer ces excès du moment que le résultat final était l'éviction de Kadhafi.
Entre temps, le plan de paix de l'Union Africaine; appelant à un cessez-le-feu, à la rédaction d'une constitution et à des élections démocratiques a été totalement ignoré par les présidents Obama et Sarkozy et par le premier ministre Cameron. L'effusion de sang et des destructions massives auraient pu être évitées si le président Obama avait pris son téléphone pour dire à la secrétaire d'Etat Hillary Clinton d'appuyer publiquement le plan de l'Union Africaine.
De fait, les dirigeants Occidentaux ont toujours eu la volonté de bien faire comprendre que la destine de l'Afrique, comme à l'époque de la conférence de Berlin et du partage de l'Afrique en 1885, se décidait encore de nos jours dans les capitales occidentales.
Dès les années 1960, le visionnaire Kwame Nkrumah avait déclaré que l'indépendance du Ghana et de chaque pays africain pris à part était sans signification tant que l'Afrique ne s'unissait pas pour créer une armée et un commandement continentaux. Il disait qu'autrement, les pays africains seraient incapables de protéger leurs indépendances et leurs ressources.
L'avertissement de Nkrumah n'avait pas été entendu; ironie de l'histoire, Kadhafi était encore plus détesté par la Grande Bretagne et la France à cause de ses actions de ces dernières années en faveur de l'unité africaine.
La Libye, isolée, a résisté pendant 6 mois aux attaques massives de l'OTAN. L'OTAN n'aurait jamais attaqué une Afrique unie avec une armée unique ainsi que l'envisageait Nkrumah.
Les pays africains devraient méditer les leçons de la Libye.
La Libye et une grande leçon pour tout le continent. Restez divisés à vos risques et périls.