par Manlio Dinucci
L'OTAN dément l'information qu'un de ses hélicoptères ait été abattu, en garantissant que tout va bien. Nos avions, a dit le 10 juin le porte-parole du Commandement conjoint allié à Naples, ont effectué 10.500 missions sur la Libye dont la moitié environ de bombardement, et intensifient les attaques sur des objectifs à Tripoli. En conclusion, « notre tactique fonctionne ». Tout cependant ne fonctionne pas comme on voudrait à Washington. Dans son intervention le même jour à Bruxelles, devant un think tank européen, le secrétaire étasunien à la Défense Robert Gates a déclaré qu'un avenir « sombre » se dessine pour l'OTAN. Les Etats-Unis, « leader traditionnel » de l'alliance, sont épuisés à cause d'une décennie de guerre et de déficits croissants de leur budget, mais ne voient pas d'engagement correspondant chez leurs alliés.
Robert Gates
L'OTAN, critique Gates, fonctionne à deux vitesses : d'un côté il y a les alliés qui ont la volonté et la capacité de payer le prix et de tenir des engagements (parmi lesquels, même s'il ne la nomme pas, se trouve l'Italie), de l'autre ceux qui profitent des bénéfices de leur appartenance à l'OTAN mais ne veulent pas partager les risques et les coûts. Certains, même, veulent que ce soit les contribuables étasuniens qui endossent la charge croissante provoquée pour la sécurité de l'Alliance par la réduction des budgets européens de la défense. Faible aussi l'engagement des alliés en Afghanistan, où, en plus, ceux-ci imposent des restrictions à l'utilisation de leurs propres forces. Et, malgré la décision de l'OTAN d'assumer le commandement de la guerre aérienne en Libye, l'alliance est à cours de bombes après 11 semaines seulement de bombardements. Toute l'opération échouerait s'il n'y avait un gros soutien continu des Etats-Unis, qui fournissent aux alliés les armes pour les attaques aériennes (bombes et missiles), ceux-ci n'ayant pas fait les investissements requis pour avoir les armes nécessaires dans des opérations guerrières prolongées. La guerre en cours en Libye, souligne Gates, prouve que l'alliance est désespérément à court d'avions de reconnaissance et pour l'approvisionnement en vol des chasseurs-bombardiers. Le problème principal est le manque d'investissements militaires adéquats dans trop de pays de l'OTAN. Ces pays doivent donc potentialiser leur capacité de combat, en termes de ressources financières, d'entraînement et de logistique. Au Congrès et dans le monde politique étasuniens on assiste de fait à une diminution de l'envie et de la patience de dépenser toujours plus de fonds précieux pour le compte de nations qui ne semblent pas disposées à consacrer les ressources nécessaires ou à faire les changements qui s'imposent pour être des partenaires sérieux et compétents dans la défense.
Sur le ton du caporal hurlant sur ses recrues, le chef du Pentagone engueule les alliés, en les rappelant à la discipline. Il leur ordonne d'avoir plus d'engagement dans les guerres et de plus dépenser dans le domaine militaire, sans dire que toutes les guerres de l'après-guerre froide (les deux contre l'Irak, celles contre la Yougoslavie, l'Afghanistan et la Libye) ont été voulues et dirigées par Washington pour ses propres intérêts, et sans dire que la dépense militaire de l'OTAN atteint les deux tiers de la dépense mondiale.
Nous sommes avertis : les 25 milliards d'euros annuels que l'Italie dépense dans le militaire ne suffisent pas[1]. Il en faut davantage pour que l'Italie puisse rester parmi ceux dont le Pentagone fait la promotion.
Edition de samedi 11 juin de il manifesto
Traduit de l'italien par Marie-Ange Patrizio
[1] La France, d'après fr.wikipedia.org, était en 2010 au 4 ème rang mondial des dépenses annuelles de défense (59,3 milliards de dollars).