Par Khaled Amayreh
Cherchant désespérément à s'agripper au pouvoir face à la pression montante de la rue, le régime égyptien de Hosni Moubarak aurait déployé et payé des milliers de voyous pour attaquer les milliers de manifestants excédés par la tyrannie du régime Moubarak qui exigent sa démission. Ces voyous, appelés en arabe baltajiya, ont jeté des pierres sur les manifestants, espérant les faire fuir.
Des militants protègent le Musée du Caire contre les bataljiya
D'autres ont brandi des poignards, des épées et autres objets tranchants avec lesquels ils ont soit poignardé soit cherché à intimider les manifestants résilients de la place Tahrir, au centre du Caire. On a vu certains des voyous à cheval, et même sur des chapeaux, tenter de piétiner les manifestants. Les baltajiya, postés sur les toits, ont fait un usage intensif de bombes incendiaires contre les protestataires, avant de tirer à balles réelles sur l'énorme foule, tuant plusieurs personnes et blessant des centaines.
Les bataljiya (pluriel de batalji) sont jeunes, sans instruction, sans emploi, des jeunes gens enclins à la violence recrutés par le régime ou le Parti National au pouvoir pour intimider et terroriser les opposants politiques, falsifier les élections et organiser des manifestations en soutien au régime en cas de besoin.
Les bataljiya ont joué un rôle central dans le truquage et la falsification des récentes élections en Egypte, qui ont été presque totalement "remportées" par le parti al-Hisbel Watani de Moubarak.
Voilà le comportement du régime que les Etats-Unis et autres puissances occidentales ont soutenu, entretenu et cajolé pendant plus de 30 ans, en échange de la sauvegarde de leurs intérêts dans cette région volatile. Nous parlons essentiellement de 30 ans de dictature, de répression, de corruption et d'absence des droits de l'homme et des libertés civiles.
C'est un régime malfaisant qui va au-delà de la falsification d'élection et du viol de la volonté du peuple ; c'est un régime qui n'hésite même pas à tuer son propre peuple pour rester au pouvoir.
Selon des rapports confirmés et fiables provenant du Caire, les voyous payés par le régime ont commis tous les crimes imaginables contre les citoyens du Caire et dans tout le pays, pour intimider les protestataires et accuser l'opposition des crimes du régime tyrannique.
Ils ont attaqué des maisons privées, agressé des gens ordinaires, volé des magasins et mis le feu à de nombreux immeubles. Même le Musée central du Caire, qui contient les vestiges de 6000 ans de civilisation égyptienne, n'a pas été épargné par la sauvagerie des voyous qui ont essayé de l'incendier pour donner aux forces de sécurité, en particulier à l'armée, un alibi pour déclarer l'état d'urgence et écraser les protestations anti-Moubarak une bonne fois pour toutes.
Quels mots pourraient donc décrire avec précision un tel régime qui, pour rester au pouvoir, a eu recours à l'impensable, à savoir mettre le feu lui-même à l'Egypte et assassiner ses fils et ses filles ? Faut-il détruire l'Egypte pour qu'un changement de régime ait lieu ?
Mohammed ElBaradei, leader de l'opposition, a bien décrit la manière par laquelle le régime de Moubarak a cherché à contrecarrer la révolution en Egypte comme "des tactiques criminelles par un régime criminel."
Un journaliste occidental qui a couvert les révolutions iranienne et roumaine, et plusieurs autres en Europe de l'Est et en Amérique du Sud contre des régimes autocratiques, a dit, pour décrire la turpitude du comportement du régime égyptien envers les protestataires :
"J'ai couvert plusieurs révolutions dans le monde où les forces pro-régimes ont employé des méthodes affreuses pour intimider les révolutionnaires ; mais je n'ai jamais été témoin du niveau de dépravation, de gangstérisme et de voyoucratie que nous constatons en Egypte aujourd'hui."
Il ne fait aucun doute que le régime égyptien se comporte avec un mépris total du peuple égyptien qui veut transformer l'Egypte d'une dictature à une démocratie, et d'un pays qui opprime ses citoyens à un pays qui leur témoigne du respect.
Finalement, l'indicateur réel du niveau de démocratie dans n'importe quel pays se révèle lorsque le gouvernement commence à avoir peur du peuple. Toutefois, quand le peuple craint le gouvernement et que celui-ci ignore avec mépris les problèmes du peuple, on peut dire que la dictature et la tyrannie prévalent.
Nous ne savons pas quel type de régime assumera finalement le pouvoir en Egypte, la nation arabe la plus forte et la plus peuplée. Mais nous espérons que la fin du jeu verra la disparition de ce régime de voyous qui, pour faire plaisir et apaiser Israël et ses amis en Amérique du Nord et en Europe, est prêt à brutaliser, à persécuter et même à tuer son propre peuple.
Le peuple égyptien en a vraiment marre de ce régime tyrannique et ne le supportera plus. Trente ans de corruption, de répression et de mensonges ont convaincu pratiquement tous les Egyptiens que Moubarak doit partir et qu'une nouvelle Egypte honorable doit pouvoir émerger des ruines de l'actuelle dictature pourrie.
Bien que largement considéré comme le nombril du despotisme dans le monde arabe, le régime égyptien est loin d'être le principal oasis de l'autoritarisme dans le monde arabe. A l'exception rare du Liban, presque tous les autres régimes arabes sont tyranniques et corrompus, chacun ayant un roi décadent et mafieux ou à sa tête un président à vie qui prépare son fils à lui succéder, comme cela est déjà arrivé au Maroc, en Syrie, en Jordanie et dans les royaumes du Golfe persique et les Emirats, et comme on pensait jusqu'à récemment que cela arriverait dans des pays comme l'Egypte, la Libye et le Yémen.
Mais dans un certain sens, le régime égyptien a servi de centre de gravité pour tous ces régimes tyranniques, principalement à cause du statut traditionnel politique et culturel qu'a l'Egypte dans le monde arabe depuis la révolution de 1952, lorsqu'un groupe d'officiers égyptiens, le Mouvement des Officiers Libres, dirigé par Gamal Abdul Nasser, a renversé la monarchie du roi Farouk.
C'est pourquoi il faut espérer qu'une véritable transformation vers un régime qui soit plus comptable devant ses masses jouera un certain effet domino dans le monde arabe et conduira à une démocratisation véritable et durable.
Malheureusement, il y a des centres de pouvoir manifestement racistes et fascistes en Occident qui ne cessent de pousser ces gouvernements à rester, en soutenant des régimes dictatoriaux dans le monde arabe. Leur mantra est que ces régimes servent à tenir les Islamistes à distance. Mais c'est un raisonnement fallacieux et au mieux erroné, car le soutien continu de ces régimes tyranniques ne fait que contribuer à approfondir la haine de l'Occident parmi des centaines de millions de Musulmans dans le monde. Finalement, cette politique à courte vue conduit à davantage d'instabilité, davantage d'extrémisme et davantage de pertes stratégiques pour l'Occident dans cette région vitale.
En outre, il n'existe aucune preuve soutenant l'affirmation qu'avec des islamistes sunnites au pouvoir dans quelques pays arabes, le monde arabe deviendrait irrémédiablement hostile ou inamical aux intérêts occidentaux légitimes, que ce soit dans les domaines économique et politique.
Cela ne veut pas dire pourtant qu'un Moyen-Orient islamique ou quasi-islamique ne chercherait pas à regagner son honneur, sa dignité et son indépendance perdus, longtemps usurpés par les puissances occidentales, principalement par l'installation du pouvoir d'agents locaux comme les rois, les émirs, les cheikhs et les présidents à vie du monde arabe.
Dans tous les cas, les Arabes, même les plus craints, les Iraniens, ne sont pas vraiment foncièrement hostiles à l'Occident.
Les Musulmans, y compris les soi-disant Islamistes, veulent seulement être traités avec respect.
Source : Palestine Info
Traduction : MR pour ISM