Signes implicite d'inquiétude qu'Israël s'attelle pourtant à vouloir dissimuler : le Bureau du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a demandé à tous les porte-parole et aux ministres de ne pas parler aux médias au sujet de ce qui se passe en Égypte.
Al-Manar
Alors que cette révolution en est à son cinquième jour, l'administration israélienne s'est distinguée par son silence. Qui en dit longtemps sur sa réelle position officielle, laquelle devrait refléter une profonde inquiétude du risque de perdre l'un de ses principaux alliés dans la région, Housni Moubarak, et surtout celle de voir renverser un régime lequel avait été le premier dans le monde arabe (1979) à avoir conclu un accord de paix avec lui. Sachant que lors de la révolution tunisienne, cette position israélienne avait été plus claire et plus rapide : par la voix de Sylvan Shalom
Absence de position ne veut surtout pas dire absence d'intérêt : c'est bien le contraire qui a lieu : le ministère des Affaires étrangères suit attentivement les développements en Égypte, effectue des évaluations de la situation, toutes les heures, alors que le ministre des Affaires étrangères Avigdor Lieberman s'est entretenu avec l'ambassadeur d'Israël au Caire, Yitzhak Levanon, afin d'entendre son évaluation, rapporte le quotidien israélien Haaretz.
En parallèle, ce sont les experts qui sont consultés par les médias israéliens. Eux aussi semblent vouloir peser leurs mots, et ne sont pas à l'aise dans l'expression de leur réelle position à l'égard de ce qui se passe en Égypte. Comme s'il s'agissait d'éviter les erreurs commises lors de la révolution tunisienne : leur regret pour la destitution de ZinelAbidine Ben Ali et leur inquiétude que la révolution tunisienne ne contamine les autres peuples arabes avaient révélé au grand jour leur véritable visage : celui qui refuse les choix libres et démocratiques des peuples arabes et de vouloir soutenir les despotes qui les répriment. Selon le quotidien israélien The Jerusalem post, "les troubles civils au Moyen-Orient inquiètent les experts israéliens". "Bien que les répercussions pour la sécurité nationale de l'État hébreu soient difficiles à prévoir, les experts estiment que les mouvements de masse, qui débutent comme des soulèvements pro-démocrates, pourraient rapidement être détournés par des islamistes" souligne le quotidien.
Cette position montre bien implicitement un souci israélien de ne pas paraître hostiles à des mouvements pro-démocrates. Tout en affichant une leur soi-disant appréhension que les Islamistes n'accèdent au pouvoir.
"Nous devons comprendre que nous vivons sur un volcan", a expliqué le général Yaacov Amidror, ancien chef de la Recherche et de l'Évaluation de Tsahal. "Les conditions peuvent évoluer entre aujourd'hui et demain. Mais nous devons nous préparer au pire des scénarios." Et de poursuivre : "C'est comme être sur une couche de glace épaisse ; mais cela finira par fondre." "Les conseils émis par certains pays d'Europe de l'Ouest - qui suggèrent que les soulèvements soient suivis d'une vague de révolutions démocratiques - ne devraient pas être suivis. Il n'y a pas de raison de craindre une escalade de la violence immédiate. La question se pose sur le long terme", poursuit-il.
Selon le général Giora Eiland, ancien conseiller à la sécurité nationale, "le risque que les Frères musulmans prennent le pouvoir en Égypte existe. Ce serait préjudiciable, non seulement pour Israël mais pour tous les démocrates." Et d'expliquer que "le véritable combat ne se déroule pas entre Moubarak et les éléments pro-démocrates, mais entre Moubarak et les Frères musulmans".
La conclusion est certes bien débranché de la réalité de ce qui se passe en Égypte : l'ancien chef de l'AIEA, Mohammad ElBaradei, qui est rentré dans la nuit de vendredi à samedi, en plus de nombreux partis qui participent à la révolution ne sont pas du tout des islamistes. Il serait candide de croire dans une telle généralisation une lacune dans l'analyse. Elle est surtout le fruit d'une volonté de travestir la réalité, en brandissant le spectre de la montée de l'islamisme, promu à la bête noire des Occidentaux, pour se permettre après de fustiger aisément une révolution populaire.