• Un autre texte sur la mort de la globalisation, désormais largement autopsiée et authentifiée. • L'événement mérite de servir de cimier à tous nos commentaires et recherches concernant ce qui vient vers nous.______________________
19 avril 2025 (17H00) – Il est vrai, et il doit être compréhensible, que malgré la pression extraordinaire de l'actualité nous devons mettre l'accent sur les interrogations, les réflexions, les méditations sur l'avenir énigmatique qui nous est réservé. Il importe de quitter les rives du folklore complotiste comme disent les globalistes aux abois, aussi bien que les batailles sans fin ni profit sur la validité des détails d'une pseudo-fakenews. Il est temps d'abandonner les duels sans fin, sans foi ni loi, sans grandeur ni honneur, des idéologistes dogmatiques et manichéens. Il est vital de cesser de s'aventurer dans les folles galopades des sables mouvants des narrative et des simulacres, fût-ce pour les pourfendre et pour les détruire.
Comme écrit l'auteur Mario Bozzi Sentieri, encore un Italien, dans ce texte qui nous offre une autre version de l'enterrement de la globalisation (et non de la mondialisation, – une fois encore, j'y reviendrai), – comme il l'écrit, nous le ressentons nous-même à chaque instant :
« La partie est encore à jouer. [...]» En être conscient est le premier pas, tout en gardant à l'esprit, face à la fin du globalisme idéologique, la nécessité d'un nouveau finalisme, politique, social et culturel, qui ne peut naître que d'une série de questions "de base". [...]
» À quel modèle socio-économique, une fois les anciennes références disparues, faudra-t-il se référer ? Selon quelle vision géopolitique ? Vers où regarder ? Travailler pour quelles alliances ? »
Il est vrai que le dernier espoir de nous entraîner vers le néant, eux les globalistes qui sont en fait volens nolens les messagers du Diable et qui sont écrasés par l'effondrement de leur simulacre, est bien de nous enferrailler dans des combats où ils sont perdus d'avance mais où leur victoire est de nous faire croire qu'il faut encore les embrocher pour les prendre au sérieux. D'où la difficulté du commentateur de poursuivre sa tâche répétitive de faire tomber son masque au Diable chaque fois que l'autre le remet. Mais qu'il sache bien, le commentateur, – j'en sais quelque chose dans toutes mes convictions, – que cette bataille qui est celle de l'esquive du piège est conduite de tous temps depuis l'éternité car cet enjeu ("le piège") est celui-là même qui est tendu à toute entreprise civilisatrice, à toute justification de l'existence.
Ainsi doit-on suivre une fois de plus un auteur, Mario Bozzi Sentieri, qui nous propose une réflexion interrogative sur notre destinée, en écartant comme évidents le sens des batailles en cours et les arguments qui soutiennent ce sens. Cette fois, c'est-à-dire une fois de plus, il s'agit donc de l'enterrement de la globalisation, un des plus énormes et grossiers, un des plus récents pièges que l'Ange Noirs nous ait tendu. Étant d'ailleurs déchu, il finit par déchoir dans sa puissance et par conséquent dans notre estime de sa puissance, satisfaisant ainsi une des maximes tant de fois répétée par nous (là aussi, l'art répétitif), d'une profonde sagesse, de René Guénon :
« L'on dit même que le diable, quand il veut, est fort bon théologien ; il est vrai, pourtant, qu'il ne peut s'empêcher de laisser échapper toujours quelque [bêtise], qui est comme sa signature... »
Le texte original de Mario Bozzi Sentieri est édité sur le site ‘ barbadillo.it' ; en traduction et daptation françaises, sur le site ‘ euro-synergies.heutetfort.com'.
dde.org
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Au-delà du crépuscule de la globalisation
Le crépuscule du globalisme et l'écriture de nouveaux équilibres
La linéarité progressive d'une globalisation inconditionnelle est aujourd'hui en train de s'estomper. Tout comme diminue l'illusion de la "fin de l'Histoire".
La déglobalisation n'est plus un tabou. Entre de nombreux arrêts et redémarrages, annonces, espoirs et peurs, le fait nouveau qu'est la guerre des tarifs nous confronte au grand thème de la fin d'un cycle, celui de la globalisation, et de son véritable dépassement. Tout doit être repensé et discuté, et pas seulement sur la base des actions lancées par Trump. En effet, les initiatives du président américain ne doivent pas être considérées comme la cause des tensions sur les marchés, de la finance et des relations commerciales entre les États, mais plutôt comme l'effet d'une crise plus profonde et subtile, qui dure depuis des années et qui a maintenant éclaté comme un bubon arrivé à maturation.
Il y avait déjà eu quelques signaux dans les années précédentes, à la suite de la détérioration, durant l'urgence Covid, des chaînes d'approvisionnement mondiales, de la compétition pour les matières premières et du reshoring, c'est-à-dire du retour des productions industrielles dans les pays d'origine des entreprises.
La linéarité progressive d'une globalisation inconditionnelle est aujourd'hui en train de s'estomper. De même que diminue l'illusion de la "fin de l'Histoire", théorisée en 1989 par Francis Fukuyama suite à la chute du mur de Berlin, au point qu'il imaginait un monde pleinement pacifié et "intégré", sous l'égide de la révolution technologique, du triomphe du capitalisme et du nouvel ordre libéral-démocratique.
Comme l'a souligné Aldo Di Lello ("Ascension et déclin de la globalisation", dans l'ouvrage collectif intitulé "Souverainisme - Les racines et le projet", Giubilei Regnani 2019), "la globalisation ne découle pas tant de processus économiques que de choix politiques, en ce sens qu'elle est le résultat d'une accumulation extraordinaire de pouvoir rendue possible par la complaisance des gouvernements et des parlements d'Europe et d'Amérique". Avec pour résultat – à l'épreuve des faits – de polariser les richesses (à l'intérieur des États et entre eux), de construire de véritables monopoles de production (concentrés dans les soi-disant pays émergents, grâce à une main-d'œuvre à bas coût), de démanteler les classes moyennes (favorisant l'expansion de nouvelles formes de précarité et de prolétarisation).
Les accélérations de Trump en matière de tarifs s'inscrivent dans ce contexte.
Au fond, il ne s'agit pas tant (ou pas seulement) de préfigurer une possible sortie de l'imbroglio (face à un déficit américain d'environ 1200 milliards de dollars et donc à la nécessité de "remplir les caisses") que surtout de favoriser les entreprises qui produisent aux États-Unis, en encourageant le retour des productions sur le territoire national.
Le fait certain – à la lumière de ces indications sommaires – est que nous sommes tombés dans un futur inattendu, qui change les perspectives. La partie est encore à jouer. C'est là le grand défi de la culture, des institutions représentatives et du monde du travail. C'est ici que se joue le défi de l'avenir. En être conscient est le premier pas, tout en gardant à l'esprit, face à la fin du globalisme idéologique, la nécessité d'un nouveau finalisme, politique, social et culturel, qui ne peut naître que d'une série de questions "de base".
À quel modèle socio-économique, une fois les anciennes références disparues, faudra-t-il se référer ? Selon quelle vision géopolitique? Vers où regarder ? Travailler pour quelles alliances ?
Reviennent à l'esprit les analyses provocatrices mais lucides de Guillaume Faye, jeune représentant de la Nouvelle Droite, qui, dans la première moitié des années 80, dans son petit ouvrage intitulé Contre l'économisme, préfigurait déjà une économie non plus dans un cadre planétaire et/ou national, mais subcontinental, une économie organisée en zones homogènes du point de vue historique et culturel ; avec une Europe technologiquement à la pointe, dans un système de marché intra-européen soumis aux principes du surplus, de la "création monétaire directe", de l'autarcie des grands espaces ; avec "un État qui ne soit ni totalitaire, ni mercantile, ni paternaliste, ni socialisateur, qui laisse 'agir' pleinement les forces créatives du marché, mais en leur assignant des limites bien définies, en bref, un État qui ne fasse pas l'économie, mais qui la dirige politiquement et juridiquement, mais plus sur un mode plus économique et plus social". Au centre, l'idée d'un système dans lequel les individus se sentent mobilisés par des objectifs politiques, nationaux, collectifs, "lyriques", etc. Du marxisme – disait Faye – je conserve l'idée de la planification, du libéralisme je conserve l'idée du marché (qui ne lui appartient cependant pas en exclusivité). "Provocations" d'un jeune et transgressif intellectuel hors des schémas courants, d'hier et d'aujourd'hui ? Peut-être, mais dans un climat de stagnation idéale et projectuelle (avec des gouvernements contraints d'activer des interventions "tampons" plutôt que d'imaginer des révolutions épocales), l'espoir est que le temps des re-discussions "globales" arrive enfin, adaptées au changement d'époque et marquées par un "pragmatisme intelligent" capable de se mesurer sans réserve aux nouveaux scénarios internationaux.
Dans le bouleversement des cartes de la globalisation, sous la poussée du protagonisme américain, prendre acte que l'Europe, aujourd'hui, représente l'aire la plus faible et la plus exposée aux vents de la crise signifie aller au-delà des polémiques contingentes et des interventions à court terme. Pour prendre conscience des nouveaux équilibres mondiaux et de la complexité des défis qui se profilent : géopolitiques et productifs, énergétiques et financiers, commerciaux et militaires. C'est ici que se joue notre destin. En être conscient est le premier pas pour activer les contre-mesures nécessaires, évitant d'être emportés par une crise qui se prévoit dramatique. Stimuler des débats (et des lectures inhabituelles de la réalité) en sortant enfin des schémas du vieux mondialisme, est un premier pas essentiel pour commencer à construire les nouveaux équilibres politiques et socio-économiques d'un monde à repenser, capable de faire face aux défis du changement.
Mario Bozzi Sentieri