Erno RENONCOURT
Le bug de l'insignifiance cognitive
C'est là que la problématique de notre axiomatique de l'indigence prend toute sa pertinence et sa cohérence. Elle nous oblige à refuser l'évidence pour questionner l'imaginaire et l'intelligence des peuples en détresse afin de trouver les raisons de leur impuissance devant leur exploitation ou déshumanisation. Des questions qui résonnent dans l'air du temps : qu'est ce qui rend le néolibéralisme, dans ses variantes contextuelles, si puissant, au point qu'il puisse assurer de manière durable sa performance défaillante, malgré les foyers innombrables d'insurrection qui se multiplient un peu partout dans le monde entier ? N'y a-t-il pas une certaine perte de sens collective devant le réel paradoxal ? Le néolibéralisme n'a-t-il pas, en enjolivant ses impostures, virtualisé ses structures, au point que même ceux et celles qui prétendent le combattre ne sont que les divers rouages assemblés qui permettent à son engrenage de fonctionner comme une mécanique bien huilée ? Le néolibéralisme ne produit-il pas une attraction qui nourrit l'incapacité des peuples à apprendre de leurs expériences ? Un collectif peut-il, sans volonté d'apprentissage résolu, intranquille et durable (ce que Hélène Trocmé-Fabre appelle apprenance dans le livre : Réinventer le métier d'apprendre, 1999), forger les leviers de responsabilité pour s'enraciner, sans érosion de dignité, dans son contexte problématique et y construire le centre de valeurs qui garantit toujours l'équilibre, et permet de résister avec intelligence, sans subir impuissamment la dynamique invariante de l'exploitation ou de la déshumanisation ?