14/03/2012 wsws.org  7min #64776

 Obama et le Pentagone préparent les plans de guerre contre la Syrie

Le Pentagone fait des plans pour une guerre en Syrie

Par Bill Van Auken
14 mars 2012

Mercredi, dans leur témoignage devant le comité du Sénat, les chefs civils et militaires du Pentagone ont confirmé qu'ils étaient en train de préparer des plans de guerre contre la Syrie à la demande de la Maison Blanche et d'Obama.

Les déclarations faites par le Secrétaire à la Défense, Leon Panetta, et le président du conseil d'état-major interarmées américaines, le général Martin Dempsey, sont survenues à un moment où les preuves s'accumulaient que Washington et ses alliés clés européens, tout en collaborant avec les régimes monarchiques de droite d'Arabie saoudite et du Qatar, étaient en train d'intensifier une intervention secrète dans le but de provoquer un changement de régime en Syrie.

La majeure partie de la couverture médiatique du témoignage de mercredi s'est concentrée sur l'intervention chauvine du sénateur de l'Arizona, John McCain, ancien candidat républicain à l'élection présidentielle. Il exige des frappes aériennes contre la Syrie pour établir des « zones refuges » dans lesquelles les groupes armés soutenus par l'Occident peuvent préparer des frappes militaires contre le gouvernement du président syrien Bachar al-Assad.

« Combien de civils doivent encore perdre leur vie avant de vous convaincre que des mesures militaires telles que nous les proposons sont nécessaires pour mettre fin aux meurtres et contraindre Assad de quitter le pouvoir ? » a demandé McCain à Panetta.

Le secrétaire à la Défense a répondu en affirmant, « Nous sommes du même avis à ce sujet. » Il a insisté en disant que le Pentagone « passait en revue toutes les mesures supplémentaires possibles pouvant être prises » pour accélérer la chute du régime Assad, « y compris des options militaires éventuelles, si nécessaire. »

Le général Dempsey a mis en garde qu'une intervention américaine en Syrie serait bien plus difficile que la guerre de l'OTAN en Libye compte tenu du « mélange démographique, ethnique et religieux très différent » du pays. Il a toutefois assuré au panel du Sénat, « Si nous étions amenés à défendre les intérêts américains, nous serions prêts. » Le président du conseil d'état-major interarmées a ajouté que les opérations militaires envisagées comprenaient l'imposition d'une « zone d'exclusion aérienne », l'ouverture d'un « corridor humanitaire, » un blocus naval du littoral syrien et des frappes aériennes.

Panetta et Dempsey ont tous deux répété les déclarations faites la veille lors de la conférence de presse tenue par Obama à la Maison Blanche comme quoi ce serait une « erreur » que d'« entreprendre une action militaire unilatérale. »

Aucun d'eux n'a toutefois mentionné une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU autorisant le recours à la force militaire comme condition préalable à une intervention militaire en Syrie.

Un responsable anonyme de haut rang du département de la Défense a clairement dit à la chaîne de télévision CNN que le gouvernement ne considérait pas qu'une résolution de l'ONU - qui jusque-là a été bloquée par la Russie et la Chine exerçant tous deux un droit de veto au Conseil de sécurité - était indispensable. « Un quelconque mandat d'une organisation régionale » pourrait suffire, a précisé le haut responsable, ou une couverture multilatérale pour une intervention américaine telle la « coalition des volontaires » du gouvernement Bush rabibochée avant la guerre en Irak.

La Turquie, qui accueille ce mois-ci une conférence des « Amis de la Syrie » est particulièrement importante à cet égard. Tout en s'opposant formellement à l'intervention militaire d'une force militaire « extérieure à la région, » la Turquie a réclamé la chute d'Assad et a exigé que la Syrie autorise l'ouverture de « couloirs humanitaires. »

De la même façon, les Nations unies ont planifié un « plan d'urgence » pour livrer une aide alimentaire aux civils syriens. Le département d'Etat américain s'est servi de ce plan qui exigeait « un accès immédiat, sûr et libre » à toutes « les régions affectées » en Syrie.

En réponse, le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid al-Muallim, a dit que son gouvernement s'opposerait à toute intervention étrangère. « Des corridors humanitaires signifient des corridors militaires, » a-t-il dit. « Vous ne pouvez pas avoir des corridors humanitaires sans protection militaire. »

Durant son témoignage, il fut demandé à Panetta si les Etats-Unis fourniraient « des équipements de communication » aux groupes armés qui cherchent à renverser le gouvernement Assad. Panetta a répondu qu'il préférerait « discuter ceci lors d'une session à huis clos, » tout en permettant au gouvernement d'« envisager une suite de mesures d'assistance non létale. »

En fait, il y a une multitude de rapports disant que le gouvernement américain est déjà allé bien au-delà de tout ceci.

Dans un article paru mardi, le magazine américain Foreign Policy a cité des responsables haut placés du gouvernement qui ont confirmé qu'une réunion de la sous-commission du Conseil de sécurité nationale des Etats-Unis avait déjà adopté une politique « pour étendre l'engagement des Etats-Unis avec des militants syriens et leur donner le moyen de s'organiser. »

« La politique américaine suit à présent le principe de permettre à l'opposition de renverser le régime Assad, » a dit un responsable au journal. « Ceci marque un changement significatif de notre politique syrienne. »

Ce responsable a ajouté que des démarches sont entreprises pour soutenir le comité militaire formé dernièrement par le Conseil national syrien et que Washington considère comme étant une force fantoche plus fiable que l'Armée syrienne libre. « Il y a une reconnaissance que l'assistance létale à l'opposition pourrait s'avérer nécessaire mais pas pour le moment, » a-t-il ajouté.

Mais un courriel publié récemment par  WikiLeaks et faisant partie de documents internes obtenus de la société privée américaine de renseignement Stratfor montre qu'une telle « assistance létale » existe déjà depuis des mois.

Le courriel daté de décembre 2011 émanait de Reva Bhalla, le directeur de l'analyse chez Stratfor. Le courriel décrit une réunion avec des agents du renseignement militaire au Pentagone et comprenant un officier britannique et un officier français. Ces officiers qui font partie d'un groupe d'études stratégiques des forces aériennes américaines ont suggéré que « les équipes de SOF [forces d'opérations spéciales] sont déjà sur le terrain et se concentrent sur la mission recce [reconnaissance] et l'entraînement de forces de l'opposition. »

Selon Bhalla, les officiers ont dit que l'objectif des équipes des forces spéciales était de « perpétrer des attaques de guérilla, des campagnes d'assassinats, de tenter de faire craquer les forces alaouites, et de provoquer l'effondrement de l'intérieur. »

La veille de l'apparition de Panetta et de Dempsey devant le comité des forces armées (Armed Services Committee) du Sénat américain, le général James Mattis, le chef du Commandement central (Centcom) qui supervise l'ensemble des forces américaines au Moyen-Orient, s'est exprimé devant le même panel en donnant une évaluation franche des objectifs américains en Syrie.

« Si nous devions proposer des options, quelles qu'elles soient, pour accélérer la chute d'Assad, » a témoigné Mattis, « ceci causerait beaucoup d'inquiétude et de mécontentement à Téhéran. »

Déclarant que l'Iran était « la menace la plus importante dans la région » Mattis a dit, « Pour l'Iran, la chute d'Assad serait le plus grand revers stratégique de ces 20 dernières années. »

Les véritables méthodes et objectifs de l'impérialisme américain se cachant derrière l'attitude de Washington de défendre les civils en Syrie commencent à émerger clairement. Les Etats-Unis mènent une campagne terroriste en Syrie dans le cadre de préparatifs pour une intervention militaire directe.

Washington cherche à renverser Assad non pas dans l'intérêt des droits humanitaires ou de la démocratie mais pour promouvoir les intérêts stratégiques américains et affaiblir l'Iran, allié de la Syrie, et que Washington considère être le principal obstacle à sa tentative d'asseoir son hégémonie sur les régions riches en pétrole du Golfe persique et d'Asie centrale. Ainsi l'escalade permanente de l'intervention américaine en Syrie comporte des préparatifs pour une guerre bien plus vaste et aux conséquences mondiales.

(Article original paru le 9 mars 2012)

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