par Fulvio Vassallo Paleologo
Le décret loi annoncé par le gouvernement sur les rapatriements forcés et sur la prolongation de la détention administrative, s'il reprend à son compte quelques aspects positifs de la directive 2008-2016 comme la réduction à 5 ans de l'interdiction de retour (qui est actuellement de 10 ans), maintient une ample appréciation administrative, en prévoyant que l'absence de documents d'identité concrétise en soi le « risque de fuite » et permet donc de procéder immédiatement à l'accompagnement forcé à la frontière. Ne semblent pas non plus garanties les procédures que la directive prévoit en cas de retenue administrative, surtout quand elle concerne la validation de la prorogation du traitement dans les Cei (Centres d'identification et d'expulsions, voir note, NDT)[1]. On court aussi le risque de retenues sommaires et de validations « collectives » des mesures sans motivations individuelles, comme c'est arrivé ces jours-ci à Palazzo San Gervasio, dans la province de Potenza, en opposition flagrante avec les droits de la défense reconnus par l'article 24 de la Constitution italienne.[2]
Préoccupant surtout, au moment où le ministre Frattini (affaires étrangères, NdT) annonce de nouveaux accords de refoulement et de réadmission, est le maintien de fait, au-delà de la partiale reconnaissance du rapatriement volontaire, d'un système qui se fonde dans la majorité des cas justement sur l' « accompagnement normal forcé » à la frontière des immigrés irréguliers et sur leur maintien, jusqu'à même 18 mois, dans des structures comme les Cie qui ne garantissent pas le respect des droits fondamentaux, du droit à la défense, du droit au contrôle effectif du magistrat en cohérence avec l'art. 13.[3]
La prolongation à 18 mois de la détention administrative ne comportera pas une plus grande effectivité des procédures d'éloignement forcé, mais elle rendra par contre ingouvernables des structures dans lesquelles aujourd'hui déjà se multiplient tentatives de fuite, actes d'automutilation, avec des opérations de répression des protestations qui semblent configurer ces « traitements sommaires et/ou dégradants » interdits par l'art. 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.[4]
* Fulvio Vassallo Paleologo est enseignant de Droit Privé et Droit d'asile à la faculté de Jurisprudence de l'Université de Palerme
Edition de samedi 18 juin 2011 de il manifesto
Traduit de l'italien par Marie-Ange Patrizio
[1] Centres d'identification et expulsions, voir la carte du ministère de l'Intérieur italien :
[2] Article 24 de la Constitution italienne de 1947 :
Il est reconnu à tout individu le droit d'ester en justice pour la protection de ses droits et de ses intérêts légitimes. La défense est un droit inviolable dans tous les états et à tous les degrés de la procédure.
Les moyens d'ester et de se défendre devant toutes les juridictions sont assurés aux indigents par des institutions juridiques spécifiques
La loi détermine les conditions et les modalités de la réparation des erreurs judiciaires.
[3] Article 13 :
La liberté de la personne est inviolable. Il n'est admis aucune forme de détention, d'inspection ou de perquisition concernant la personne, ni aucune autre restriction de la liberté de la personne, si ce n'est par un acte motivé de l'autorité judiciaire et dans les cas et sous les seules formes prévus par la loi.
Dans des cas exceptionnels de nécessité et d'urgence, expressément prévus par la loi, l'autorité de police peut prendre des mesures provisoires, qui doivent être communiquées dans les quarante-huit heures à l'autorité judiciaire. Si cette autorité ne confirme pas ces mesures dans les quarante-huit heures suivantes, celles-ci sont considérées comme rapportées et sont privées de tout effet.
Toute violence physique et morale sur les personnes soumises de quelque manière que ce soit à des restrictions de liberté est punie.
La loi fixe les limites maximales de la détention provisoire.
[4] Article 3 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales :
Interdiction de la torture
Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.
(Toutes les notes sont de la traductrice)