par Patrick Reymond
Dans la grande distribution. Il y a un peu plus de 60 ans, les grandes surfaces ouvraient en France, en dehors des zones qui abritaient des bases américaines. En fait, les premières grandes surfaces étaient construites pour leurs soldats. Puis, le temps a passé, le modèle a été généralisé et le pays a été quadrillé, par ces hypermarchés, ces supermarchés et a fait trépasser le petit commerce de triste mémoire, ce petit commerce alimentaire qui s'en était foutu plein les fouilles pendant «les heures les plus sombres de notre histoire», en fait, plus longtemps que cela, pendant la décennie 1940-1950 date des dernières restrictions.
Une classe sociale d'ailleurs, tellement enrichie qu'au sortir de ces années-là, ils avaient refusé les retraites par répartition, ou plutôt, cette classe sociale avait choisi une retraite de la taille d'un string brésilien. Gavé d'argent et d'immobilier, ils imaginaient la situation éternelle, qu'ils n'avaient pas besoin de la collectivité pour vivre de leurs rentes.
Changement des années 1960, le supermarché se généralise, et l'hypermarché aussi. De fait, ce triomphe entraine pas mal de problèmes aujourd'hui. D'abord parce que le parc est vieux, très vieux, et construit avec des normes énergétiques de ces années-là. Donc, désormais, la structure est souvent ruineuse, et plus c'est grand, plus ça consomme.
De plus, certains mais pas tous, ont oublié que la distribution, fut-elle grande, c'est de l'épicerie.
Certains ne l'ont pas oublié, Super U, Intermarché, Leclerc et savent qu'il faut qu'ils vendent beaucoup avec de petites marges.
D'autres sont handicapés par ce qui fut leur force, la taille ; Carrefour, qui tente un changement de format, à tous les niveaux. Notamment par la généralisation de la franchise, tendance lourde.
Enfin, les mourrus, Casino, surendetté par un dirigeant, euh... pas très malins (mais avec un gros ego surdimensionné), mais aussi, Auchan, les deux, trop chers, l'un parce qu'il était endetté, l'autre parce qu'il voulait faire du dividende. Ils ont perdu leurs clients, qui savent quand même, pour beaucoup, compter et s'apercevoir des prix trop élevés. Auchan se bat encore, mais les perspectives sont très négatives, et il est clair que même si le redressement est possible, l'enseigne aura quitté la cour des grands pour ne plus y revenir.
Les grands gagnants sont les petits magasins, hard discounters, avec des gammes réduites, mais de petites surfaces, du genre Lidl, Aldi et bien d'autres qui eux, n'ont pas forcément le vent en poupe. Parmi eux, Leader Price, entrainé dans la chute de Casino et souvent racheté par Aldi, dont il ne restait qu'un reliquat, dernièrement liquidé.
Moralité ? La grande distribution a vécu un âge d'or de 1960 à 1980 en France, un âge plus inquiet jusqu'en 2008, mais la progression était là, même si elle était beaucoup moins forte. On voit un déclin net des ventes à partir de 2008.
Le constat est clair. Qui a vécu par l'épée périra par l'épée. La Grande distribution était assise elle aussi, sur le pétrole. Elle s'est développée avec lui, et décline avec aussi.
source : La Chute