Source: Sputnik
Offre limitée : pourquoi le prix du bitcoin a atteint un nouveau record historique ? [image d'illustration]
Selon les experts, les acteurs du marché achètent massivement des cryptomonnaies pour sécuriser leur épargne dans un contexte d'incertitude croissante, alimentée par les guerres commerciales engagées par les États-Unis. Quels sont les autres facteurs qui influencent le cours du bitcoin, et combien de temps cette dynamique peut-elle se maintenir ?
En trois mois, le bitcoin a vu sa valeur multipliée par 1,5 tandis que la capitalisation totale de l'ensemble des cryptomonnaies en circulation s'est rapprochée de 2 350 milliards de dollars. Le bitcoin figure désormais parmi les six actifs les plus valorisés au monde, derrière les sociétés américaines Amazon (2 360 Mds $), Apple (3 190 Mds $), Microsoft (3 730 Mds $), NVIDIA (4 030 Mds $), et l'or (22 550 Mds $).
La hausse brutale du bitcoin s'explique par un afflux spéculatif de capitaux sur le marché des cryptomonnaies, selon Vassili Guiria, propriétaire et directeur général de la société GIS Mining. D'après lui, ces derniers mois, les investisseurs ont accru leurs achats de bitcoins pour préserver la valeur de leur capital dans un climat d'incertitude croissante, dû aux tensions commerciales provoquées par les États-Unis.
« Les facteurs géoéconomiques, les politiques protectionnistes et les guerres tarifaires ont accru l'intérêt pour les cryptomonnaies en tant que "refuge alternatif". Dans un contexte de forte volatilité des marchés traditionnels et d'inquiétudes croissantes quant aux risques commerciaux et politiques, le bitcoin apparaît comme un instrument d'investissement prometteur et un actif de couverture efficace », explique-t-il à RT.
Rappelons qu'en avril, les États-Unis ont imposé des restrictions à l'importation de produits en provenance de plus de 200 pays. Pour la majorité de leurs partenaires commerciaux, Washington a appliqué des droits de douane de 10 %, tandis que d'autres pays ont été visés par des barrières tarifaires spécifiques. Certains gouvernements ont alors demandé à négocier, poussant les États-Unis à suspendre temporairement ces droits pour consultation. Cependant, Donald Trump a annoncé que ces restrictions seraient rétablies à partir du 1er août.
Selon Vassili Guiria, en plus des guerres commerciales, les investisseurs sont préoccupés par l'aggravation des tensions entre la Maison Blanche et la Réserve fédérale, qui fait office de banque centrale des États-Unis. Ces dernières semaines, Donald Trump a intensifié ses critiques envers la Fed, l'accusant de maintenir des taux d'intérêt excessivement élevés. Il est même allé jusqu'à menacer de limoger son président, Jerome Powell, si l'institution ne procédait pas à un assouplissement de sa politique monétaire.
Selon les analystes, les marchés redoutent une perte d'indépendance de la Réserve fédérale. Par mesure de précaution, certains investisseurs se débarrassent de leurs dollars et réorientent leurs capitaux vers des actifs jugés plus fiables, y compris les cryptomonnaies.
Depuis avril, le dollar américain a reculé d'environ 7 % sur les marchés internationaux, et début juillet, son indice (DXY) face à un panier de monnaies de réserve a atteint son plus bas niveau depuis trois ans.
« La hausse record du bitcoin est directement liée aux initiatives de Donald Trump. La perte de confiance envers la monnaie fiduciaire, combinée à des anticipations inflationnistes, stimule traditionnellement la demande pour des actifs alternatifs tels que le bitcoin. Une réaction similaire avait déjà été observée lors de son premier mandat présidentiel », a expliqué à RT Fiodor Sidorov, fondateur de l'École d'investissement pratique.
De plus, souligne Vassili Guiria, les attaques répétées de Trump à l'encontre du président de la Fed renforcent les attentes d'une baisse prochaine des taux d'intérêt aux États-Unis.
Si le crédit devient moins cher, cela pourrait provoquer une nouvelle vague d'investissements dans le secteur des cryptomonnaies, estime l'expert.
Déséquilibre du marché
Le bitcoin bénéficie également du changement d'orientation de l'administration américaine, qui s'engage désormais en faveur d'une libéralisation du secteur crypto. C'est ce qu'explique Denis Astafiev, fondateur de la plateforme fintech Shares Pro.
« Ont joué un rôle important les initiatives stratégiques de création d'une réserve numérique nationale, la nomination de responsables favorables aux cryptos et la réduction de la pression réglementaire. Tout cela a permis le lancement massif des ETF Bitcoin, des fonds cotés dont les parts sont indexées sur le prix du bitcoin. Aujourd'hui, ces produits financiers continuent d'enregistrer des volumes records d'entrées de capitaux », a-t-il précisé.
Parallèlement, l'offre de bitcoins sur le marché mondial ne parvient pas à suivre la demande accrue, ce qui renforce encore la pression haussière sur le prix de l'actif, ajoute l'analyste. Selon lui, ce déséquilibre est en partie dû au halving de l'an dernier, réduction programmée de la récompense accordée aux mineurs de bitcoins.
Pour rappel, le bitcoin fonctionne sur la base de la technologie blockchain, une base de données unique et décentralisée répertoriant toutes les transactions effectuées. La création de nouveaux bitcoins repose sur le minage : un processus consistant à résoudre des équations mathématiques complexes afin de valider un nouveau bloc dans la chaîne. Chaque bloc contient les données de toutes les transactions réalisées depuis le précédent. Les mineurs reçoivent des bitcoins en récompense de ce travail.
« La tendance reste à la hausse jusqu'à la fin de l'année »
À ce jour, plus de 19,89 millions de bitcoins ont été extraits. Selon le protocole d'origine, contrairement aux monnaies fiduciaires pouvant être émises sans limite, le protocole du bitcoin prévoit un plafond de 21 millions d'unités.
Par ailleurs, l'émission devient chaque année plus complexe car elle exige toujours plus de puissance de calcul, tandis que la récompense diminue. Elle était de 50 bitcoins par bloc en 2009, 25 en 2012, 12,5 en 2016, 6,25 en 2020, et de près de 3,13 en 2024.
« Depuis le halving, les mineurs vendent moins de bitcoins que ce que les grands investisseurs sont prêts à acheter. Si l'intérêt des fonds reste élevé et que la Fed baisse ses taux dans les mois à venir, le bitcoin pourrait viser les 120 000 à 128 000 dollars. Certaines prévisions parlent même de 140 000 à 150 000 dollars d'ici la fin de l'année », indique Astafiev.
Il précise toutefois qu'un risque existe : celui de prises de bénéfices après cette flambée spéculative, ce qui pourrait entraîner une chute brutale du cours, comme cela s'est produit à plusieurs reprises par le passé.
Vassili Guiria partage cette analyse : « À court terme, une prise de bénéfices et une correction modérée sont tout à fait possibles, compte tenu de la forte hausse observée ces dernières semaines, notamment ces deux derniers jours.
Cependant, dans le scénario central, la tendance reste à la hausse jusqu'à la fin de l'année : si le contexte extérieur reste favorable, le bitcoin pourrait s'établir au-dessus des 130 000 dollars dès le début de l'automne et continuer à viser de nouveaux sommets historiques.»