14/07/2025 open.substack.com  7min #284130

Néodénazification

 Dav

En s'attaquant au "néofascisme", Poutine désignait une cellule dormante de l'ancien nazisme qui a survécu jusqu'à aujourd'hui - comme il en existe dans différentes parties du monde, comme en Argentine - et dont la résurgence a été, comme la fois précédente, sponsorisée par les empires déclinants.

Cet effet des empires déclinants avait été décrit par Glazyef comme un événement qui a lieu tous les cinquante ans.

Mais je n'étais pas à l'aise avec cette dénomination qui faisait l'impasse sur des formes plus larvées du nazisme, qui portent beaucoup mieux le qualificatif de "néo", et qui sont diffuses, faiblement détectables, et dont l'accentuation conduit inévitablement aux mêmes résultats, que sont la ségrégation des populations sur des critères abstraits, la haine, et enfin le crime de masse justifié par une volonté de nettoyer le monde de sa pourriture.

S'il y a bien une pourriture dont le monde doit être nettoyé c'est justement la croyance selon laquelle il suffit d'éradiquer un symptôme pour se croire débarrassé de la cause du mal. La cause du mal, de la souffrance morale que ressentent les nazis, est située à l'intérieur d'eux, pas à l'extérieur.

La vraie définition du nazisme est psychopathologique, et non pas l'uniforme ou l'adoration de symboles de destruction. L'"uniforme", c'est l'apparence prise par la psychopathologie. Si à une époque elle se voulait virile et autoritaire, cette apparence a été suffisamment réprimée pour que la psychopathologie puisse se mouvoir sous d'autres apparences, plus discrètes à notre époque, comme le sionisme ou même le Lgbt.

L'intérêt de la psychopathologie est de pouvoir s'exercer silencieusement sans être dénoncé, car sitôt qu'elle est dénoncée elle ne peut plus s'exercer, et dès lors, exprimer le "mal" qui est en soi, la rupture, le disjonction dans l'élaboration de la pensée, doit prendre une autre forme. Elle reste toujours présente et doit s'exprimer pour être adressée et guérie.

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Dans tous les cas il s'agit de dénier le droit de l'autre à accéder à une liberté et des émotions, un droit d'habiter le monde et de s'y sentir épanoui, là où le malade n'accède pas à ce droit pour lui-même, en raison de sa psychopathologie. On peut dire que c'est une loi universelle de l'harmonie. Et que tant qu'on n'en a pas conscience, elle agit négativement.

[Donc pour guérir le nazisme il faut offrir un exemple de bonheur de vivre auquel tout le monde est invité, ce qui n'est pas facile].

Quand Poutine a ciblé héroïquement ledit "néo"-nazisme, il a soulevé une réalité qui était occultée, et qui est l'expression de la fin de l'ancien empire de l'unilatéralité. À l'époque (il y a quatre ans) le mot "nazisme" était dix fois moins prononcé (et prononçable) qu'aujourd'hui.

Il est certain qu'avec ce qu'il a qualifié de "néonazisme", cela embarque les autres formes de néonazisme larvés. Cependant en faisant cela il a consacré le terme de néonazisme à cette réémergence de l'ancien nazisme à la place des autres émergences modernes, qui par le fait, ont le champ libre.

Les mots sont importants, ils embarquent des points de vues et dès lors, occultent des réalités.

Il aurait mieux valu s'abstenir du préfixe de "néo" et décrire la réalité présente (en Ukraine, de façon probante) par le terme de "résurgence du nazisme", afin de laisser le néonazisme là où il est, en tant que nouvelle forme du nazisme.

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Aujourd'hui on assiste à Gaza à un événement qui est banal et largement documenté en psychopathologie, bien qu'il soit encore délicat d'en isoler les concepts clairs qui permettent de les expliquer. Il s'agit de l'événement qui consiste à "faire l'inverse". S'opposer c'est fuir. Faire fuir en est l'expression.

Il s'agit de prétendre s'opposer au nazisme, orné de la médaille de ceux qui ont été opprimés par lui, afin de le pratiquer, toute honte bue, avec la même détermination et la même absence d'empathie que le nazisme. Mais sans que cela ne heurte leur conscience. Au contraire, "ils se défoulent", "ça leur fait du bien".

On parle d'extermination de masse, de purification ethnique, de déplacement forcé des populations, de déportation, et même maintenant de camp de concentration. N'est-ce pas suffisant, pour évoquer la triste contradiction ?

Pourtant l'équivalent moderne de Hitler continue d'être reçu dans les chancelleries, et malgré le mandat d'arrêt international émit par le Cour Pénale Internationale, fondée justement à l'occasion du nazisme, personne ne l'arrête.

Cette même CPI a perdu sa crédibilité justement en étant phagocytée par le nazisme larvé qui n'a cessé de la torpiller de l'intérieur ; et cette dévaluation sert aujourd'hui, en reflétant une stratégie machiavélique, à permettre au nazisme de passer entre les mailles des filets qui lui sont tendus.

Même un certain hongrois qui s'est érigé contre la guerre stupide menée par l'Europe contre la Russie en se servant de l'Ukraine, un pays pauvre cédé par la Russie - et qui notamment s'est dressé contre l'idéologie Lgbt portée par cette-même Europe - a refusé d'appliquer le mandat d'arrêt contre le nouvel Hitler lorsqu'il est venu lui serrer la main, et a démissionné de la CPI, en raison justement de sa corruption. Par cette seule action, alors qu'il avait tout fait pour faire stopper la guerre en Ukraine - ce qui aurait dû lui valoir un prix Nobel de la Paix - il s'est totalement décrédibilisé. En un sens l'action de faire la photo, souriant, serrant la main à Hitler, a permit, stratégiquement, de le détruire ; ce que voulait faire l'UE.

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Au-delà de cela, la Russie n'a jamais véritablement pointé du doigt le véritable nazisme qui se joue devant ses yeux, dès lors qu'il n'en est pas directement victime et qu'il n'y a pas de ressortissant russe en Palestine.

S'il ferme les yeux au nom de la sacro-sainte politique de non-ingérence dans les affaires des autres pays, dont la nouvelle norme des relations internationale est porteuse afin de marquer une opposition à l'ancien régime des empires coloniaux, là encore c'est le résultat d'une stratégie machiavélique qui consiste à utiliser ses qualités contre lui.

Pour être juste, la politique de non-ingérence dans les affaires des autres pays doit avoir ses propres limites, comme celle à laquelle on assiste, de non-assistance à un peuple en danger.

Ce n'est pas acceptable de laisser faire cela, et encore moins de le laisser faire cela en ayant peur que soit reproché d'avoir enfreint ses propres règles, et de ré-ouvrir la voie à l'ingérence parasitaire.

Violer ses propres règles, est plutôt l'apanage de l'ancien empire de l'unilatéralité.

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Pour cela, la stratégie de Poutine (apparemment, si je ne me trompe) est de se dépêcher d'établir des liens bivalents avec le plus grand nombre de pays, alliés, dans le plus grand respect de leur autodétermination, sous le paradigme chinois du "gagnant-gagnant". Ceci afin d'établir un précédent, une base solide et viable, qui démontre l'intérêt et la valeur des nouvelles normes de relations internationales.

Ces nouvelles normes, ne sont rien d'autre que celles stipulées explicitement dans la charte des Nations Unies, à ceci près qu'elles ont été dévoyées avec le temps. Il ne s'agit que de les réaffirmer, de façon tangible et exemplaire.

Mais pendant ce temps, le problème est qu'un peuple est exterminé, et que les différentes formes de nazismes ne sont aucunement ciblées ou inquiétées. On découvre alors la limite de la non-ingérence, et il est certain qu'avec la confusion mentale qui est prodiguée par les différentes formes de nazisme, il ne soit pas simple de faire le discernement entre ce qui est bien et ce qui est mal.

Pour faire ce travail, qui a été explicitement nommé par le terme de dénazification, il ne s'agira pas de s'en tenir à l'ancienne définition de ce terme, qui consiste à enseigner la vraie histoire aux jeunes, et à les inciter à penser par eux-mêmes.

Pour faire ce travail, que nous appelleront de "néodénazification", il faut s'attaquer aux racines psychopathologiques qui sévissent tous les jours, à tous les niveaux, y compris dans le langage ou les postures, de la disjonction cérébrale qui consiste à survivre en tant que personne divisée intérieurement.

Il s'agit de faire la chasse, pour soi-même et pour son propre bien par soi-même et volontairement, à toutes les graines qui engendrent la violence, d'une manière ou d'une autre. Et cela ne consiste pas en une "extermination du mal", cela consiste à, au contraire, ajouter de l'information, donner du contexte et de la profondeur, donner du sens à ce qui fait une vie en paix où on est fidèle à soi-même, et en même temps, utile aux autres.

Le seul moyen de lier ces deux pôles antinomiques et l'humilité.

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