par Amir Saeid Iravani
Comme suite à nos lettres datées des 13, 16, 18, 19, 20, 21 et 23 juin 2025 (S/2025/379, S/2025/387, S/2025/388, S/2025/391, S/2025/401, S/2025/404 et S/2025/410), je tiens, par la présente, à rejeter catégoriquement et à dénoncer fermement les affirmations faites par la Représentante des États-Unis à la 9944e la séance du Conseil de sécurité, tenue le 24 juin 2025 au titre de la question intitulée « Non-prolifération ». La Représentante des États-Unis a cyniquement tenté de justifier le recours illégal à la force par les États-Unis contre la souveraineté et l'intégrité territoriale de la République islamique d'Iran - en particulier l'attaque délibérée et non provoquée menée contre les installations nucléaires pacifiques de l'Iran le 21 juin - comme un acte de légitime défense au sens de l'Article 51 de la Charte des Nations Unies. Elle a également déclaré que rien, dans le statut de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), n'empêchait les États de prendre des mesures pour assurer leur légitime défense, individuelle ou collective. Dans ce contexte, je tiens à appeler votre attention et celle des membres du Conseil de sécurité sur ce qui suit :
1. La justification des États-Unis est juridiquement infondée et constitue une déformation flagrante du droit international et de la Charte des Nations Unies. Le recours illégal à la force contre les installations nucléaires pacifiques de l'Iran - qui sont entièrement contrôlées par l'AIEA et dont le caractère pacifique a été confirmé à maintes reprises - ne peut en aucun cas relever du droit de légitime défense au sens de l'Article 51. Cette interprétation arbitraire et biaisée de l'Article 51 est fondamentalement incompatible avec la Charte des Nations Unies, le droit international et la jurisprudence de la Cour internationale de Justice. Si elle était normalisée, cette prétention illégale porterait gravement atteinte à l'un des principes les plus fondamentaux de la Charte : l'interdiction du recours à la force. Comme l'a affirmé l'Assemblée générale dans sa résolution 3314 (XXIX), tout recours préventif à la force en l'absence d'une attaque armée réelle constitue un acte d'agression manifeste. Selon la doctrine juridique établie et la jurisprudence de la Cour internationale de Justice - en particulier comme suite à l'affaire Nicaragua c. États-Unis d'Amérique de 1986 et à l'affaire République islamique d'Iran c. États-Unis d'Amérique de 2003 relative aux plates-formes pétrolières - le droit de légitime défense ne peut être invoqué qu'en riposte à une agression armée et seulement lorsque l'ensemble des conditions de nécessité et de proportionnalité sont réunies.
2. Les États-Unis et le régime israélien ont invoqué la prétendue menace nucléaire posée par l'Iran comme prétexte à leurs actes d'agression, qui ne reposent sur aucun fondement juridique ou factuel crédible. Le dernier rapport du Directeur général de l'AIEA ne fait état d'aucune violation par l'Iran de ses obligations en matière de garanties, ni d'aucun détournement de matières nucléaires. L'Agence confirme sans équivoque dans son rapport qu'il n'existe aucune preuve d'un programme de mise au point d'armes nucléaires en Iran. Même les services de renseignement des États-Unis l'ont admis. Par conséquent, l'invocation d'une soi-disant « menace imminente » est dépourvue de tout fondement juridique en droit international et dans la Charte des Nations Unies. En outre, comme il l'a réaffirmé dans sa résolution 487 (1981), le Conseil de sécurité a explicitement condamné les attaques contre des installations nucléaires, les considérant comme des violations de la Charte des Nations Unies. De même, la Conférence générale de l'AIEA a réaffirmé sans équivoque, notamment dans ses résolutions GC(XXIX)/RES/444 et GC(XXXIV)/RES/533, que toute attaque ou menace d'attaque armée contre des sites et installations nucléaires destinés à des fins pacifiques constitue une grave violation du droit international et porte atteinte à la valeur même de l'AIEA et à la crédibilité de son régime de vérification et de surveillance. Par conséquent, à quoi servent les garanties si le recours unilatéral et illégal à la force peut simplement remplacer les protections offertes par l'AIEA ?
3. Dans sa résolution 487 (1981), adoptée à l'unanimité le 19 juin 1981 en réponse au bombardement par Israël du réacteur nucléaire Osirak, en Iraq, le Conseil de sécurité a « condamn[é] énergiquement l'attaque militaire menée par Israël en violation flagrante de la Charte des Nations Unies et des normes de conduite internationale » et « demand[é] à Israël de s'abstenir à l'avenir de perpétrer des actes de ce genre ou de menacer de le faire », notamment. De plus, il a prié le Secrétaire général de le tenir régulièrement informé de la mise en œuvre de la résolution en question. En attaquant délibérément les sites et installations nucléaires pacifiques de l'Iran, lesquels sont soumis à des garanties, les États-Unis, membre permanent du Conseil de sécurité à qui à ce titre il incombe au premier chef d'assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationales, se sont livrés à une violation caractérisée de la résolution même qu'ils avaient adoptée et, ce faisant, ont sapé l'autorité et la crédibilité du Conseil de sécurité.
4. L'emploi illégal de la force et les attaques armées non provoquées menées sous le couvert de la légitime défense par le régime israélien le 13 juin 2025, puis par les États-Unis, membre permanent du Conseil de sécurité et dépositaire du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, le 21 juin 2025, contre les installations nucléaires pacifiques de l'Iran soumises aux garanties de l'AIEA ont créé un précédent extrêmement dangereux qui a directement et gravement sapé l'autorité du Traité, a mis gravement en péril, de façon irréparable, la crédibilité et l'intégrité de l'ensemble du régime de non-prolifération et fait peser une menace sérieuse pour la paix et la sécurité internationales.
Compte tenu de ces graves violations et de leurs dangereuses incidences, l'invocation par les États-Unis de l'Article 51 de la Charte des Nations Unies sur le droit de légitime défense pour justifier les actes d'agression commis par les États-Unis et Israël doit être rejetée et condamnée explicitement et sans équivoque.
Ainsi, la République islamique d'Iran demande de nouveau aux membres du Conseil de :
1. Rejeter explicitement et sans équivoque la prétention des États-Unis et d'Israël à la « légitime défense préventive », principe non fondé en droit, qui constitue une interprétation erronée et arbitraire de l'Article 51 de la Charte des Nations Unies et est contraire au droit international ;
2. Condamner avec la plus grande fermeté l'emploi illégal de la force, par le régime israélien et les États-Unis, contre la souveraineté nationale et l'intégrité territoriale de l'Iran, y compris ses installations nucléaires pacifiques soumises à des garanties, en en ce qu'il constitue un violation flagrante du paragraphe 4 de l'Article 2 de la Charte des Nations Unies, du droit international, des résolutions 2231 (2015) et 487 (1981) du Conseil de sécurité, du statut de l'AIEA et des résolutions de la Conférence générale de l'AIEA sur la question.
La République islamique d'Iran demande de nouveau au Secrétaire général de :
1. Soumettre au Conseil de sécurité et à l'ensemble des Membres un rapport sur l'état d'application du paragraphe 2 de la résolution 487 (1981), en particulier en ce qui concerne les violations et le ciblage par le régime israélien de sites et d'installations nucléaires pacifiques placés sous les garanties de l'AIEA.
Je vous serais reconnaissant de bien vouloir faire distribuer le texte de la présente lettre comme document du Conseil de sécurité.
Source : ONU S/2025/417