Une Globalisation-antiGlobalisation
• Vous savez, n'est-ce pas, que la globalisation est morte. • Même Starmer le dit : quelle référence ! • Mais savez-vous qu'une autre Globalisation est en train de naître ? La Globalisation-antiGlobalisation. • Ce n'est pas notre faute si l'on suggère ainsi l'acronyme GaG.
13 avril 2025 (15H20) – L'historien Brecht Jonkers fait partie de cette sorte de "nouvelle critique" apparue en Occident et qui ressuscite les courants nés après la guerre 1914-1918 (antiguerre parce qu'antimoderne, surtout antiaméricaniste dans le cadre de l'antimodernité), mais dans un contexte aujourd'hui infiniment plus vaste et diversifié. Alors que la globalisation "classique", – maléfique pour les dissidents, – est déclarée morte de divers côtés (le plus bruyant étant celui du Britannique Keith Starmer, dont la sagacité ne cesse de soulever des interrogations), une autre globalisation apparaît ; on dirait, si l'on ne craignait la lourdeur, une Globalisation antiGlobalisation (qu'on devra orner de majuscules) ; c'est-à-dire un courant critique général, transnational, très ouvert sur l'extérieur, qui fait une éloge métahistorique de la diversité civilisationnelle et condamne la démarche civilisationnelle prédatrice du bloc occidental.
C'est dans ce "camp" ouvert aux autres "camps" pourvu qu'ils regroupent les partisans de l'identité civilisationnelle affirmant son être en tant que tel, que l'on place Brecht Jonkers. On le place, par exemple aux côtés d'un Alexandre Douguine, d'un Constantin von Hoffmeister, etc. Cet "etc." est aujourd'hui bien vague parce qu'il tente d'embrasser une école critique qui est la fois déconstructrice des formes subversives et prédatrices du concept de civilisation, et formatrice des nouveaux arrangements civilisationnels et inter-civilisationnels ; et cette "école", extrêmement diverse, ne cesse de pulluler de l'arrivée de nouveaux parrticipants.
Le texte de Jonkers met en évidence l'incapacité des pays du bloc moderniste (meilleure désignation que "bloc BAO", après tout, dans tous les cas mise au "goût du jour", ‘updated' comme on dirait au Pentagone ?) de comprendre la spécificité d'autres civilisations, et surtout, surtout volonté de ces pays du bloc-moderniste de ne pas les comprendre ni même de les percevoir !
C'est bien là la formule victorieuse, ont-ils décrété depuis si longtemps : ne pas les percevoir ni les comprendre conduit tout simplement, c'est l'essentiel, à nier leur existence. Il y a une complète logique dans cette attitude puisque le bloc-moderniste est la civilisation unique, celle qui se nommait ‘globalisation'. Cette civilisation unique et globalisée ne pouvait évidemment concevoir, au besoin en liquidant l'histoire selon une vieille habitude, l'existence d'autres civilisations qu'elle-même. La globalisation ("leur globalisation") est morte disent les leaders du bloc moderniste sans réaliser eux-mêmes (ah ! Starmer-Macron, duo triomphant), qu'ils scient la belle branche hypermoderniste sur laquelle ils perchent, – par conséquent leur bloc-moderniste s'effondre sous leurs fesses amaigries et atrophiées. Ils ont la finesse de Starmer et la culture de Macron, vide et néant s'épousaillant dans une union de circonstance.
Note de PhGBis : « Poursuivons la phrase : "...Tandis que naît une nouvelle ‘globalisation' : une Globalisation-antiGlobalisation, – ce qui donnerait l'acronyme ‘GaG' par exemple ! Il rendrait bien compte des gags dont est faite leur tragédie-bouffe : leur défaite est tant et pour beaucoup fille du ridicule et de l'ironie que ce ridicule suscite... Il est bon, dans ces temps de fracture et de passages de courants tumultueux, d'employer leurs propres termes, pour que nul ne s'y trompe, et si possible avec ce regard qui met en évidence leur ridicule. Gardons ‘GaG', précieusement et respectuerusement, pour des occasions de circonstance. »
Le texte ci-dessous, de Brecht Jonkers, nous livrent quelques exemples évidents qui se déploient sous vos yeux. Que dire du comportement du bloc-moderniste vis-à-vis de la Russie, de la Chine, de l'Iran ? On observe la confirmation de toutes les hypothèses de Jonkers sur l'incompréhension, l'incommunicabilité. Les personnages ont évidemment leur importance, mais en fonction de leur comportement ; si Poutine retient Witkoff pandant quatre heures et demie, c'est évidemment qu'il sait l'analyse de son interlocuteur sur les principes et la force qui animent les caractères russes, mais aussi un peu parce que Witkoff a eu l'idée de faire venir sa femme à Saint-Petersbourg, qu'ils sont tous deux allés à la synagogue de cette grande ville du Nord, puis dans une cathédrale orthodoxe. Ces simples gestes, qu'ils soient ou non voulus dans ce sens, – et que nous importe !, – indiquent à Poutine qu'il a face à lui un homme de civilisation, même milliardaire, que n'est certainement pas le général Kellogg.
dedefensa
Ignorances volontaires
Non seulement les États-Unis et l'UE ne connaissent pas les civilisations qu'ils cherchent à combattre, mais rejettent aussi activement la possibilité de le faire un jour
Une erreur cruciale que les États-Unis et la plupart des pays de l'Occident en général continuent de faire encore et encore, c'est qu'ils n'ont aucun concept réel de l'identité civilisationnelle de leurs adversaires, rivaux ou même de leurs partenaires potentiels sur la scène mondiale, ni aucun réel intérêt à en apprendre davantage.
Par exemple, cela se voit très clairement dans la position belliqueuse de l'UE envers la Russie, ainsi que dans la position complètement idiote et autodestructrice que le gouvernement américain et les partisans de Trump adoptent envers la Chine. Le mouvement Trump semble réellement croire qu'il peut gifler la Chine devant le monde entier et s'attendre à ce que Pékin se plie et obéisse sans délais aux ordres des États-Unis ; ce qui montre un manque de compréhension complet et total de tout ce sur quoi la Chine a construit son projet de renaissance nationale depuis plus d'un siècle maintenant. Ce n'est même pas que les Américains ont tendance à ne pas comprendre la Chine (ou la Russie et l'Iran par ailleurs) ; ils n'ont même aucun intérêt à vouloir en apprendre davantage sur les peuples qu'ils sont censés haïr.
On ne peut pas comprendre la Chine sans saisir l'importance des guerres de l'opium et du siècle de l'humiliation qui a suivi, sur l'esprit national chinois. La politique étrangère chinoise est née et a été façonnée à l'époque de la colonisation britannique et française, par le truchement des « concessions », de l'occupation japonaise à partir de 1894, de l'invasion par l'Alliance des Huit Nations en 1900, des millions de martyrs qui sont morts lors de la nouvelle invasion japonaise de 1931-1945, de l'intervention occidentale contre le mouvement communiste et des martyrs qui ont donné leur vie en défendant la Corée.
La Chine est construite sur des milliers d'années de tradition, associée à l'héritage révolutionnaire des Turbans Jaunes, du Royaume Céleste de Taiping, de la Rébellion des Boxers, de la Révolution de 1911 et des réalisations du Parti Communiste Chinois. Elle repose sur des millénaires de tradition où le bien commun est le principe central, et où une stricte séparation entre les fonctionnaires de l'État et la classe marchande a été une partie inhérente de la politique d'État depuis des siècles.
La Chine ne peut pas être comprise sans avoir au moins une compréhension de base de concepts tels que le Mandat du Ciel ou l'idéal du Royaume du Milieu, ou l'idéal confucéen d'une société harmonieuse. De même, on ne peut pas comprendre la Russie sans saisir le rôle que Moscou voit pour elle-même en tant qu'héritière et protectrice de l'héritage tant celui de l'Empire orthodoxe russe (et donc de la Troisième Rome) que celui de l'Union soviétique. Et ajoutez la Horde d'Or pour compléter. L'Iran ne peut pas être connu si l'on ne réalise pas que la République islamique est fondamentalement imprégnée de l'eschatologie islamique et d'une ancienne tradition de martyre, ainsi que de son héritage des empires persan et parthe.
Les véritables analystes intellectuels aux États-Unis et en Europe qui comprennent vraiment l'impulsion civilisationnelle de base derrière les puissances étrangères sont rares. Une poignée de géopolitologues intelligents ont existé dans le camp impérialiste, pensez par exemple à Halford Mackinder, Nicholas Spykman, Henry Kissinger et Zbigniew Brzezinski, mais bien souvent, ils ont dû se défendre contre des faucons bellicistes et extrémistes au sein de leur propre pays autant qu'ils pouvaient réellement se concentrer sur le service de l'Empire.
De nos jours, les États-Unis et l'UE, et, dans ces deux cas, à droite comme à gauche du spectre politique, sont dirigés par des ignares complets qui combinent un manque total de compréhension élémentaire avec des plans mégalomanes, rappelant une certaine gloire impériale et espérant des gains financiers. Une combinaison dangereuse.
Brecht Jonkers