17/03/2025 dedefensa.org  12min #272010

Spengler et l'Ukraine

 Ouverture libre  

• De plus en plus se répand la perception que la guerre en Ukraine, "c'est bien plus que la guerre en Ukraine". • Voici la vision du philosophe et historien Constantin von Hoffmeister (« Le conflit en Ukraine ne concerne pas l'Ukraine... »), qui développe un argument qui n'est pas nouveau en convoquant Spengler, mais qui nous convainc aisément, – convertis prêchés, – de la puissance et de l'importance fantastiques au niveau spirituel de la crise que nous vivons. • Là-dessus, les envolées vides et pompeuses de Zelenski et de Macron sombrent dans l'insignifiance qui convient.

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17 mars 2025 (20H50) – On le dit et on le redit, et on ne le dira jamais assez : le conflit en Ukraine et ses dives effets et conséquences oppose deux perceptions, voire même deux psychologies. L'une d'entre elles est spécifiquement occidentale et fonde le suprémacisme occidental ; et, dans la phase actuelle une partie importante des occidentaux poussent cette psychologie jusqu'à l'extrême, – ce que nous nommons du terme de "simulacre".

Exclusif ! Zoom avec Rod Dreher : Retrouver Dieu et défendre nos valeurs avec J.D. Vance , philosophe primordialiste (et  ami de JD Vance), explique Musk, Trump : un ami de JD Vance se confie sur sa foi et l’avenir spirituel des USA - Rod Dreher , en présentant son livre ‘Comment retrouver le goût de Dieu dans un monde qui l'a chassé'

« Des recherches récentes en psychiatrie, notamment aux USA, ont montré que notre façon de percevoir la réalité est conditionnée par les présupposés de notre civilisation spécifiquement occidentale. En dehors de l'Occident, les sociétés ont une capacité beaucoup plus forte de percevoir les réalités spirituelles. Je pose la question à mes lecteurs : est-il possible que nous, Occidentaux, ayons tort ? »

Bien entendu, ces deux psychologies s'affrontent en Ukraine, faisant de ce conflit bien plus que ce qu'il est, mais un conflit psychologique et civilisationnel dans un monde en pleine  GrandeCrise. Constater cela n'est plus très original aujourd'hui, mais le répéter, l'expliciter, l'apprécier et le mesurer contribuent à renforcer la crédibilité de cette situation et, nous semble-t-il, la validité de plus en plus éclatante de l'attitude opposée au suprémacisme occidental. Ce trait suprémaciste de la psychologie occidentale n'est ni blanc ni d'aucune couleur, éventuellement il serait à la base nettement anglo-saxon ; mais ses racines tendent de plus en plus à se diluer du fait des querelles internes et des grands changements qui l'agitent, – à commencer par Trump et les USA.

Aujourd'hui en Ukraine

Ces considérations générales, finalement se reflètent dans l'extrême confusion de la situation ukrainienne et de l'évolution ultra-rapide des relations USA-Russie.

• En Ukraine même, se poursuit l'avancée générale des forces russes, avec notamment ce problème de l'encerclement d'un très gros contingent de soldats ukrainiens, plus ou moins 5 000, dans les dernières positions ukrainiennes sur territoire russe. La nouveauté se trouve plutôt du point de vue de l'aggravation de la situation à Kiev même, et de l'extrême et constante fragilisation d'un Zelenski totalement enfermé dans son narcissisme fantasmé et dans son addiction aux divers opioïdes.

• Entre Trump et Poutine, la partie se poursuit, à notre avis plutôt en affichant une certaine concurrence mais s'appuyant sur une complicité objective dans le but d'en finir le plus vite possible sans qu'aucun d'eux ne perde la face ni ne protège ses intérêts avec la plus extrême fermeté (surtout le cas des Russes).

•... Il est vrai que chacun et même tous pensent au fond d'eux-mêmes que, comme dit notre auteur ci-après,

« Le conflit en Ukraine ne concerne pas l'Ukraine... »

« Cette guerre ne concerne pas l'Ukraine... »

On change de contexte

... Par conséquent, la confusion ne manque pas d'une réelle et forte logique interne qui parcourt cette crise ukrainienne pour en faire autre chose que ce qu'elle paraît être, notamment aux nombreux et vaillants journalistes des plateaux maquillés et de la presseSystème

Tout le monde sent bien, si l'on ne comprend explicitement, que la partie est très largement passée à un palier largement supérieur à l'Ukraine. C'est là que nous en venons au texte que nous présentons ci-dessous, d'un auteur que nous avons déjà rencontré, Constantin von Hoffmeister, commentateur allemand de politique et de haute culture, auteur du nouveau livre ‘ Multipolarity', et éditeur-en-chef de Arktos Publishing.

Dans  son article, von Hoffmeister hausse évidemment le cadre de l'analyse en se référant au philosophe de l'histoire Oswald Spengler. Son analyse choisit alors une représentation symbolique qu'on retrouve chez nombre de philosophes antimodernes allemands du temps (Heidegger, Anders, etc.) : opposer la spiritualité sous quelque forme que ce soit (l'histoire pour Spengler) à la technique dans son sens le plus vaste (la technologie pour Spengler selon von Hoffmeister), – c'est-à-dire la mécanisation du monde et par conséquent la mécanisation de cet homme-moderne qui a cru qu'il dominerait le monde en le mécanisant. C'est cet affrontement qui est en cours en Ukraine.

« Le conflit en Ukraine ne concerne pas l'Ukraine. Il s'agit de la dernière tentative délirante de l'Occident pour exercer un contrôle sur un monde qui n'en a plus besoin. L'Occident, perdu dans le labyrinthe de son propre cauchemar technocratique, se débat comme une bête agonisante, mécanisée et aveugle. Le philosophe historique allemand Oswald Spengler (1880-1936), dans "L'Homme et la technique" (1931), a décrit la chute ultime de la civilisation faustienne, où la technologie, autrefois extension de la culture organique, devient une cage de fer, emprisonnant ses créateurs dans un monde qu'ils ne comprennent plus. La réponse occidentale à l'Ukraine est précisément la suivante : drones, sanctions, récits médiatiques fabriqués en temps réel, illusion de toute-puissance entretenue par des algorithmes et intelligence artificielle. Mais la réalité lui échappe. Plus l'Occident se mécanise, plus il perd sa capacité à percevoir les cultures vivantes et dynamiques qu'il cherche à contrôler. »

Bien entendu, toute l'interprétation symbolique, qui est magnifiquement construite et décrite, est présente dans l'opposition qu'on perçoit entre l'Occident (l'"Occident collectif" de plus en plus réduit, de plus en plus dispersé) et la Russie. C'est une position intuitive qui caractérise la Russie, une opposition induite par l'expérience historique et la vigueur des racines civilisationnelle. Les Russes ne sont pas moins brillants que les Occidentaux dans le domaine des technologies (celles de l'armement, de l'électronique de combat, par exemple), mais il y a quelque chose en eux qui, – dans tous les cas jusqu'ici, – les prévient contre toute soumission à cette force terrible, qui préserve en eux les aspects fondamentaux de l'être.

« Cette guerre ne concerne pas l'Ukraine. Elle ne l'a jamais été. Il s'agit de la lutte finale entre la technique et l'histoire, entre la machine et l'âme. Et à la fin, la machine échouera. Spengler l'a vu. Nous le voyons maintenant. Et la Russie, quelle qu'elle soit, le comprend mieux que l'Occident ne le comprendra jamais. »

Il est intéressant, ou plutôt encourageant, de voir combien cette sorte de textes devient aujourd'hui de plus en plus courant, de plus en plus acceptable par obligation du poids de la force de pensée qu'ils représentent, – face à l'échec tonitruant des certitudes modernistes qui dominent le monde comme on l'écrase, mais d'une matière de plus en plus vermoulue, pourrie, en processus très rapîde de décomposition. Écrire cela n'est pas prendre parti, c'est simplement rendre grâce à la dignité de ce qu'il reste de respectable dans l'homme.

Félicitons-nous ! Car, – bref, – écrire cela c'est faire preuve d'un pessimisme plein d'espérance alors qu'il semblerait bien que nous n'arrivions pas à complètement nous détruire nous-même malgré notre désir forcené d'autodestruction.

dedefensa.org

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Simulacre (l'Ouest) contre réalité (Russie)

Le conflit en Ukraine ne concerne pas l'Ukraine. Il s'agit de la dernière tentative délirante de l'Occident pour exercer un contrôle sur un monde qui n'en a plus besoin. L'Occident, perdu dans le labyrinthe de son propre cauchemar technocratique, se débat comme une bête agonisante, mécanisée et aveugle. Le philosophe historique allemand Oswald Spengler (1880-1936), dans « L'Homme et la technique » (1931), a décrit la chute ultime de la civilisation faustienne, où la technologie, autrefois extension de la culture organique, devient une cage de fer, emprisonnant ses créateurs dans un monde qu'ils ne comprennent plus. La réponse occidentale à l'Ukraine est précisément la suivante : drones, sanctions, récits médiatiques fabriqués en temps réel, illusion de toute-puissance entretenue par des algorithmes et intelligence artificielle. Mais la réalité lui échappe. Plus l'Occident se mécanise, plus il perd sa capacité à percevoir les cultures vivantes et dynamiques qu'il cherche à contrôler.

Un cessez-le-feu ? Une négociation ? L'Occident les propose comme un bureaucrate proposant un nouveau code des impôts, comme si la guerre était une feuille de calcul adaptable à des projections trimestrielles. Les émissaires du président américain Donald Trump rencontrent des responsables russes, non pas parce qu'ils croient en la paix, mais parce que la vieille Amérique – son Amérique – a pressenti le changement. Un ordre mondial de puissance brute remplace le rêve occidental d'hégémonie numérique, et la Russie, la Chine et une histoire millénaire s'y opposent. Spengler l'avait vu venir : les machines prendraient le dessus sur l'âme, et l'Occident deviendrait incapable de pensée organique. C'est pourquoi ils ne peuvent comprendre la Russie – non pas par manque d'intelligence, mais parce que leur intelligence a été réduite à un processus algorithmique, dépourvu de profondeur culturelle. L'Occident pense comme une machine, et la Russie, toujours une créature de l'histoire, pense comme un empire.

Le président russe Vladimir Poutine rejette l'offre de cessez-le-feu car il sait qu'il s'agit d'un mirage. Il parle de causes profondes, d'histoire, d'un monde qui ne se réduit pas à des transactions et des manœuvres diplomatiques. L'Occident recule d'horreur. C'est là la différence fondamentale : la Russie comprend encore ce que signifie la guerre, tandis que l'Occident ne voit qu'un flux incessant de données sur les victimes, les livraisons d'armes et les objectifs stratégiques. Spengler appelait cela le tournant tragique de la civilisation faustienne : l'homme, ayant créé ses machines, ne les contrôle plus. L'Occident ne fait pas la guerre pour le pouvoir ou le territoire, mais pour maintenir l'illusion qu'il détient toujours le contrôle. La guerre comme processus. La guerre comme algorithme. L'objectif final n'est jamais la victoire, seulement la gestion perpétuelle des crises.

Pendant ce temps, les technocrates financiers du G7 inventent 50 milliards de dollars de toutes pièces, exploitant les intérêts des avoirs gelés de la Russie, un tour de passe-passe que Spengler verrait comme l'étape ultime du déclin occidental : la manipulation économique remplace la production réelle, la richesse artificielle remplace la véritable force culturelle. L'Occident ne construit plus. Il se contente d'extraire, de redistribuer et de sanctionner, espérant que les rouages de la finance mondiale remplaceront l'élan naturel d'une civilisation naissante. La Russie, au contraire, revient aux anciennes méthodes : industrie, puissance militaire, autonomie. La différence est flagrante. Une civilisation s'embourbe dans ses propres tours du chapeau mécaniques, tandis que l'autre revient à la logique fondamentale de l'histoire.

Spengler voyait la technologie à la fois comme la grande réussite et la ruine finale de l'Occident. Initialement outil, prolongement de la volonté humaine, elle se retourne contre ses créateurs, les réduisant à de simples composants d'un système qui ne leur sert plus. L'obsession de l'Occident pour les sanctions, la surveillance et le contrôle narratif n'est pas une expression de puissance. C'est un signe de faiblesse. Les véritables civilisations impériales n'ont pas besoin de microgérer le monde ; elles le façonnent par leur seule volonté. C'est pourquoi Trump, malgré ses défauts, représente la seule véritable possibilité de renaissance occidentale. Il rejette l'éthique managériale. Il comprend le pouvoir d'instinct, comme les dirigeants d'autrefois. La nouvelle révolution conservatrice américaine n'est pas une question d'idéologie. Il s'agit de reprendre le contrôle de la machine. Et pourtant, l'appareil médiatique, organisme monstrueux né de la technique, poursuit sa marche inexorable, façonnant la réalité par la distorsion. Spengler écrivait que la presse, aux derniers stades de la civilisation occidentale, cesse d'informer et dicte plutôt ce qu'il faut croire. L'Ukraine est réduite à un champ de bataille symbolique dans ce grand récit. La Russie est le méchant, car le système a besoin d'un méchant. La vérité importe peu. Les gros titres sont écrits avant que les événements ne se produisent. La guerre existe moins comme une lutte physique que comme un spectacle médiatique, un rituel grotesque dans lequel les dirigeants occidentaux jouent les guerriers tout en veillant à rester loin des conséquences de leurs actes.

Mais tandis que l'Occident est prisonnier de sa simulation, la Russie opère dans le réel. Le champ de bataille n'est pas une métaphore. C'est un lieu où les hommes tuent et meurent. Spengler a averti que les civilisations de la phase avancée deviendraient incapables de véritable guerre – elles s'engageraient dans des conflits, mais uniquement comme des exercices technocratiques, dépourvus de la lutte existentielle profonde qui a défini les grandes guerres de l'histoire. C'est pourquoi l'Occident ne peut pas gagner en Ukraine. Il combat en tant qu'entité bureaucratique, et non en tant que peuple. Et la Russie, malgré tous ses défauts, combat en tant que peuple. La différence est essentielle.

Nous voici donc, à assister à la fin d'une époque. Les techniques de l'Occident ne peuvent la sauver. Plus il s'appuie sur la technologie, plus il s'affaiblit. Les technocrates occidentaux croient guider l'histoire, mais l'histoire leur échappe. L'Ukraine n'est qu'un chapitre d'une histoire bien plus vaste – celle du retour de l'ancien monde, de l'empire reprenant sa place sur l'État managérial. Et Trump ? Il n'est pas la solution, mais il en est un symptôme. Un signe que, quelque part, enfoui sous les couches de bureaucratie et de papier peint numérique, l'Occident se souvient encore de ce qu'est la puissance.

Cette guerre ne concerne pas l'Ukraine. Elle ne l'a jamais été. Il s'agit de la lutte finale entre la technique et l'histoire, entre la machine et l'âme. Et à la fin, la machine échouera. Spengler l'a vu. Nous le voyons maintenant. Et la Russie, quelle qu'elle soit, la comprend mieux que l'Occident ne le comprendra jamais.

Constantin von Hoffmeister

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newsnet 2025-03-17 #14643
Simulacre (l'Ouest) contre réalité (Russie)

oui, on disait, dans Logiciel mental : pulsion contre raison