• La conférence sur la paix en Ukraine, tenue en Suisse et largement dénoncée par les Russes qui n'y étaient pas invités, a produit indirectement des effets qui sont plutôt favorables aux Russes. • Avec un texte de Andrew Korybko.
Beaucoup de monde, en Russie et chez les divers pro-russes attendaient le pire de la "conférence de la paix" en Ukraine tenue en Suisse, près de la ravissante ville de Lucerne. D'un certain point de vue, ils n'ont pas été déçus, surtout si l'on se tourne vers les plus importants d'entre eux, vers les puissances dont on est accoutumés à attendre des politiques spécifiques, originales, etc. Le "etc." a bien fait rire Mercouris qui, dans un de ses programmes, nota à propos des interventions de la France, du Royaume-Uni et des USA, - ceci qui réjouira les nostalgiques de Richelieu, de Vergennes, de Talleyrand, de Tocqueville, etc. :
« C'est assez peu ordinaire, mais lorsqu'on lit ces trois positions officielles exprimés sur les textes lus durant la conférence et rendus publics, on a vraiment l'impression de lire le même texte, avec les mêmes expressions redondantes, comme s'il s'agissait d'une feuille de route commune, comme si ces trois pays avaient confié le travail à un speechwriter commun... »
Comme on le voit et le comprend, les partisans des thèses russes n'avaient pas trop de soucis à se faire ; ce pourquoi, sans doute, un Korybko qui est un homme de nuances, juge assez sévèrement les réactions les plus radicales qui avaient précédé la conférence. Mais ici, il va beaucoup plus loin et juge qu'au contraire, cette conférence, effectivement un échec pour les ennemis de la Russie, a permis à certains de ses amis, et particulièrement à l'Inde, de faire avancer une idée très intéressante, - qu'on retrouvera sans doute, lors de l'autre conférence, la bonne, qui est préparée en marge du G20 au Brésil, selon une initiative commune entre le Brésil et la Chine.
Finalement, cette réunion dans la paisible Confédération Helvétique, aura permis aux adversaires de cette réunion de s'exprimer et de dire qu'ils sont venus pour observer qu'il leur fallait dire qu'il était inutile de venir ; et, de manière plus constructive, à certains de proposer que des pays à la position plus appropriée pour cette initiative prennent sur eux de proposer un nouveau cycle de conférences qu'ils conduiraient. C'est alors que Korybko cite l'Inde au vu de ses interventions, de son refus de signer le communiqué ( un des 12 pays ayant pris cette position), de sa position générale, etc., - et alors cette conférence suisse pourrait avoir servi de rampe de lancement pour un programme tout à fait différent qui ne sera pas vraiment du goût de l'Occident-répulsif.
« Un autre élément intéressant ressortant du sommet est que le commissaire ukrainien aux droits de l'homme a révélé plus tard que certains des participants qui "entretiennent traditionnellement de bonnes relations avec la Russie" ont proposé de servir de médiateur entre les deux parties belligérantes. Dans la mesure où les relations de l'Inde avec la Russie sont officiellement considérées par les deux parties comme un partenariat stratégique spécial et privilégié, il serait tout à fait logique que le chef de sa délégation soit l'un de ceux qui ont offert les services diplomatiques de leur pays. »
..... Si c'est le cas, la démarche ne sera pas très bien vue à Washington (non plus que l'initiative Brésil-Chine au G20) et contribuera à améliorer la dégradation de l'offensive de récupération dans son orbite de l'Inde par les USA. Dans ce cas, on mesure les effets à terme de cette très-étrange conférence ; et l'on n'est en rien surpris de l'embrouillement des conséquences et des enchaînements, correspondant parfaitement à l'imprévisibilité vertueusement diabolique, -ou diaboliquement vertueuse, - de cette GrandeCrise.