Remarques préliminaires
La réunion porte sur la livraison d'armes à l'Ukraine par les pays occidentaux dans le but d'opérer une escalade des tensions dans toute la région. Cette question ne sera jamais débattue.
Chaque pays présent lit un texte rédigé à l'avance dans lequel il expose sa posture de principe. En terme de discours de la guerre [ce que veulent dire les actes], on pourra résumer rapidement ces positions.
Le format ne se prête pas du tout à la discussion, seulement à l'extrême limite à pouvoir répondre à des attaques ad hominem dans le feu de l'instant en intégrant une phrase au discours préparé.
Vu du public il est "évident" (avec toute l'amplitude de l'ignorance) que ces discussions sont futiles et inutiles, parce que la mauvaise foi est une composante majeure de tout ce qui est dit. À tel point qu'il devient courant d'accuser de mauvaise foi ceux qui ne le sont pas.
Mais quand on s'approche "du géant" qu'est cette institution les choses ne sont pas si simples car la solennité avec laquelle le débat est tenu - les délégués se déplacent physiquement de toutes les parties du monde, entourés de leurs nombreux conseillers et subalternes - ne laisse aucune place aux commentaires ou à la discussion raisonnable. Chacun fait sa déclamation comme si elle était indéfectible. Il en résulte l'impression que lorsqu'il y a une discordance, rien au monde ne saura faire revenir l'un ou l'autre en arrière. Finalement c'est plus une chambre pour énerver tout le monde que pour résoudre des problèmes, au moyens de la discussion raisonnable et pacifique. Et même si quelqu'un - le délégué russe - tient des propos rationnels, objectifs, cohérents, démontrables, et pertinents, on voit bien que personne n'a envie de s'en faire un ami de beuverie. La rancœur - guidée par des pressions en arrière-plan - arrive très facilement à pondérer, déformer, ou nier les idées exposées, ou même le sens des mots (quand par exemple le terme "d'escalade" est utilisé sans mentionner à quelle échelle).
Je pense que le format d'une discussion rationnelle devrait être itérative. À chaque assertion discutable, les conférenciers devraient appuyer sur un bouton pour signaler les points qui doivent être discutés, et reprendre la parole ensuite sur ces points. La discussion devrait se terminer quand ces points sont résolus.
Principalement, l'Onu devrait mettre les transcriptions de ces dialogues en ligne, afin d'aider le public à y travailler et y réfléchir. Au lieu de cela il faut downloader la vidéo, la transcrire, la corriger et la mettre en forme.
Ensuite dans ces transcriptions il faut démarquer les propos distinctement :
- ceux qui ont un rapport directe avec le sujet de la discussion
- ceux qui sont fondés (objectivement démontrables)
- ceux qui sont subjectifs, ne relèvent que d'une impression ou construction psychologique particulière à une idiosyncrasie,
- et ceux qui permettre d'étendre la discussion au contexte définissant ou redéfinissant les termes et sujets abordés.
Les propos mensongers, rhétoriques, ou illogiques (par exemple lorsque le français attaque la livraison d'armes comme étant un motif d'escalade et y répond par une livraison d'armes au motif de chercher la paix) devraient être sanctionnés immédiatement comme des affronts à l'intelligence et entraîner le renvoi immédiat du délégué et son interdiction définitive de revenir à une quelconque table de négociation. C'est mon avis, et cela éviterait que le mensonge devienne si courant que tout le monde s'accuse mutuellement de mentir, ou que des propos soient tenus en faisant ostensiblement abstraction de ce qui a été affirmé préalablement. Ceci devrait être notifié à chaque fois comme un outrage.
Enfin, le but de la discussion, puisque c'est la seizième du genre, ce qui prouve que ça patine, devrait être expressément d'obtenir un résultat et un accord de principe. Les crimes dénoncés, s'ils sont prouvés (et parfois même affirmés), devraient être traités comme tels, et non laissés dans le vague, comme lorsque les Usa lèvent toutes les restrictions à la livraison d'armes.
Le traitement apporté aux éléments de la discussion décris précédemment devraient ensuite faire l'objet de débats afin que dans une seconde réunion, à la suite de la première, permette d'obtenir l'accord général, du moins sur le maximum de ces points :
- les éléments qui portent sur le débat
- les éléments factuels prouvés
- les éléments subjectifs ou hypothétiques projections, hypothèses, prospectives et persuasifs
- les éléments susceptibles de redéfinir la compréhension et l'interprétation des éléments factuels, de contextualisation.
Pour chacun de ces quatre points il y a des discussions et des remarques à faire, de telle sorte que certains auraient mieux fait de se taire. Ceux-là doivent subir une sanction, et interdire le délégué de revenir à une table de discussion et de résolution de problème.
Dans la discussion qui est étudiée, celle sur la livraison d'armes à l'Ukraine, les éléments non-factuels et délibérément sélectifs sont nombreux. Ils tentent d'opérer une persuasion des raisons nerveuses d'agir comme ils le font, au détriment de ce qui est démontrable. Il en va du speech du représentant ukrainien portant sur la seconde guerre mondiale, qui sert à ridiculiser la Russie, ou l'emploi du terme de dictateur à l'encontre de son président, qui sont des outrages.
Les éléments de contextualisation sont quasiment absents, sauf dans la bouche du représentant russe, qu'il ne fait qu'effleurer vu le manque de temps. Le discours du président russe lors de la réunion avec les haut-fonctionnaires des affaires étrangères qui s'est tenu la veille (newsnet.fr) était exhaustif. Il est surprenant que personne ne semble se demander, dans cette assemblée-ci, "Pourquoi" "la Russie a *envahi*, *occupé" l'Ukraine (du moins sa partie Ouest, mais cela ils ne le mentionnent même pas). La Russie est présentée comme un agresseur décérébré. Cela suffit amplement à discréditer entièrement toute la réunion, si personne n'ose remettre en question cet état de fait.
L'élément le plus important, puisque chaque délégué ne cesse de ressasser des articles de la Charte de l'Onu comme paravent ou motif légal justifiant leurs actes, comme s'ils se sentaient forcés, alors qu'ils en détournent l'esprit initial de façon évidente, est de revenir sur le point de départ de l'intervention spéciale, qui précisément se faisait en accord de cette même charte, du moins, dans le respect de son esprit de rechercher la paix. Et si la paix n'a pas été au rendez-vous, c'est à cause de la réaction fulgurante des états occidentaux qui se sont empressés de faire de l'Ukraine un terrain de bataille pour une guerre par proxy. Il s'agissait très visiblement d'un piège, mais là, sur le plan du discours de la guerre, l'action russe a consisté à dire "On va voir jusqu'où vous êtes prêts à aller pour prouver que vous avez raison, sachant que tout joue contre vous".
Les revendications de la Russie n'ont fait que croître depuis lors, et ne cesseront de croître, avec l'adhésion populaire à leur action et leur légitimité.
Notamment les référendum d'adhésion de Donetsk et de Lougansk ont été en faveur de leur adhésion à la fédération de Russie, et a été actée. Pourtant à aucun moment les émissaires occidentaux ne prêtent la moindre attention à cela, en se plaignant, et en réitérant dans chaque phrase, que la question est celle de la "l'intégrité" de l'Ukraine, "tous ses territoires", "tels que reconnus par les accords internationaux". Mais ne sont-ce pas des accords internationaux, entre ces républiques et la Russie qui ont été passés ?
Sans cesse ils parlent dune "paix juste et pérenne", et dans la bouche des occidentaux, le terme de "juste" semble signifier, comme toujours dans les négociations, "comme je veux que cela soit", et "pérenne" signifie "que personne n'a le droit de revenir sur ma décision". Les mots sont déformés jusqu'à leur faire dire le contraire de ce qu'ils veulent dire, et cela devrait être notifié ; à moins qu'on demande explicitement de s'entendre sur le sens de ces termes abscons. Jamais le travail de définition des termes n'est opéré, et si on cherche une entente ou une communication non-violente, c'est pourtant la première chose à faire.
Quand on écoute la posture de la Grande-Bretagne, des États-Unis, et le monsieur illogique de la France, ainsi que quelques autres subalternes qui mâchent leurs mots pour ne froisser personne, ou la Suisse et le Japon qui ont l'air résolument convaincus de leur sacré bon droit historique et implacable, on se demande où les discussions peuvent aller. L'impression qui en résulte est que le seul moyen de sortir de cette situation serait que la Russie, au niveau du discours de la guerre, après s'être retirée et avoir abandonné ses revendications comme si elle avait perdu la guerre, qu'elle gagne pourtant allègrement, dise : "Désolé pour la méprise, on va payer les dégâts", et espérer éventuellement retrouver le statut qui était le leur après la guerre froide - que les Usa ont pensé avoir gagnée - de simple fournisseur de matières premières à la merci d'un marché qui est passablement inéquitable.
Mais il n'est plus possible de faire marche arrière, car à présent la Russie bénéficie d'une aura à l'échelle mondiale en tant que porteur de principes de paix qui sont parfaitement dans l'esprit initial de la charte de l'Onu, le respect de l'autodétermination - qui lui est précisément reproché - et surtout a une économie en pleine croissance, et un niveau de vie qui ne fait que progresser. Si on ne s'en tient qu'à cet aspect, qui est névralgique dans ce monde gouverné par l'argent, qui est sensé représenter "l'offre et la demande" (bien que cela soit surfait), c'est une composante forte du discours de guerre, qui désigne "qui a raison".
Pour ne pas passer sous silence ce problème, celui de l'autodétermination, la question est : "De quel droit la Russie entre dans un pays pour ordonner ce qu'ils doivent faire ?", notamment lorsqu'ils réclament la démilitarisation, et la dénazification ?". C'est là que la discordance est feinte, puisque les uns (nommé "occidentaux" en incluant le Japon) font fi du contexte et des raisons, et les autres, la Russie, et la Chine "qui comprend clairement la position de la Russie", peuvent avoir un champ de vision plus large, selon lequel il est légitime de se méfier et de se prémunir contre le fait que son pays soit encerclé de bases militaires américaines (des milliers de bases), dont une dans un pays ami, limitrophe, mettant la capitale à trois minutes d'une ogive nucléaire.
Bien que beaucoup de temps se soit passé en acceptant la déliquescence de l'Ukraine, qui a subit un coup d'état, le Maïdan - dont personne n'a parlé - et que les populations russophones aient été les cibles d'entraînements nazis à la guerre, la Russie n'était pas intervenue. Et aujourd'hui, en passant par une autre porte, la Crimée, les États-Unis tentent de détruire un centre de surveillance aérien russe stratégique, prouvant par le fait que leur inquiétude était fondée.
Dans le contexte encore plus général, comme chacun le sait, la question - soulevée par le président russe la veille - est la perte de crédibilité des institutions financières américaines, qui notamment s'amusent à retenir des actifs, ce qui constitue un vol pur et simple ; et inquiète grandement les autres nations, qui tentent discrètement de se défaire du dollar.
Et bien sûr, à l'échelle mondiale, sponsorisé par cette éclat de guerre en Ukraine, qui sert de preuve flagrante de l'hypocrisie d'un empire occidental "qui ne paie pas ses factures", "qui vit sur le dos des autres", la naissance et la croissance prodigieuse des Brics, avec leur propre "Otan", leur propre "Europe", et peut-être bientôt leur propre "Conseil de sécurité", qui ajoutent une nouvelle couche de complexité aux relations internationales en introduisant le concept de réciprocité et de "bénéfice mutuel", est inarrêtable.
Et précisément, avec ce contexte, la question soulevée de la livraison incessante d'armes à l'Ukraine, dont le président est arrivé au-delà de son mandat - que personne ne voudra renouveler tant il a conduit son pays à la ruine - se comporte comme le faux-président palestinien Mahmoud Abbas, qui reste président à vie d'une nation découpée en rondelles avec son assentiment.
Précisément, la question qui devait être traitée, et qui aurait dû être traitée, est celle de l'escalade de guerre produite par la livraison d'armes à l'Ukraine, bien que les américains et les français aient tenté de détourner l'attention cette inquiétude sur la livraison d'armes de l'Iran et de la Corée du Nord à la Russie, en laissant clairement entendre que c'étaient des états-voyous et infréquentables. Mais : ce ne sont que des opinions, motivées par les intérêts, et le degrés de soumission aux état-unis de ces états. Comment, décemment, croire qu'il est légitime d'attendre que "Les Autres" se conforment à ce qui ne sont que des opinions personnelles ? Ici le discours de guerre est "Faites comme je dis, car mes croyances sont inébranlables". Lorsque le persécuteur en arrive à maîtriser à ce point le discours de guerre, on entre dans le domaine de la guerre cognitive.
Un autre aspect de la guerre cognitive a été très saillant dans cette réunion, outre plusieurs inversions accusatoires directes, il y avait les inversion accusatoires indirectes, portant sur le comportement, qui, lorsqu'il est désigné du doigt, montre que le persécuteur en a une réelle connaissance, et qu'il ne devrait pas être loin, normalement, de savoir se l'appliquer à lui-même. (Je m'excuse pour le terme de "persécuteur", je l'utilise ici à des fins de simplification). En particulier, je qualifie comme sioniste (par expérience) la procédure qui consiste dire, dans le discours de guerre autant que dans les accusations directes : "C'est VOUS qui êtes responsables du fait que NOUS devions tuer des gens".
L'exemple le plus topique est le fait que l'armée russe tire sur des enfants qui en rentrant de l'école s'approchent trop près du mur de séparation qui, outre d'être sensé former une limite, est illégal. Ils disent que c'est de leur faute s'ils se font tuer, car ils savent, on sont sensés savoir qu'ils se feront tuer. Ceci date de l'époque où on parlait de "génocide lent", là où aujourd'hui il est acté.
Il y a toujours un précédent aux événements historiques, et une long et continuel cheminement qui fait monter la pression dans la marmite, jusqu'au jour où on s'offusque qu'elle explose, alors que c'était amplement prévisible. L'histoire n'est pas telle qu'on nous l'apprend, et la guerre cognitive part toujours du principe que l'histoire est, et devrait être telle qu'on nous l'apprend, linéaire et simple. En réalité, elle est arborescente, avec des conjonctions et des effets de seuil, ainsi qu'une grande somme d'éléments qui sont "plus que l'addition des parties", d'ordre psychologique, de l'exaspération, et des limites à ne pas franchir.
Comprendre et intégrer cela est le seul moyen de s'assurer que tous, dans cette petite assemblée, se comprennent sur les raisons des événements en cours, et ne serait-ce que sur termes et définitions des mots qu'ils emploient, afin d'arriver à une entente, et une résolution de la situation.
La résolution de la guerre actuelle, ne peut se faire qu'en apportant des éléments nouveaux qui englobent et unifie les réflexions et les opinions. Cela constituerait une avancée en terme de la Justice, dans l'esprit de la justice, dans le sens où on pourra empêcher qu'à l'avenir de telles situations se reproduisent. Sans faire ce réel travail qui est d'ordre gnoséologique et ontologique, la guerre ne fera que de s'amplifier ; et effectivement, inconsciemment, semi-consciemment ou même consciemment, l'escalade tant redoutée et décriée ne fera qu'avoir lieu.