Source: AFP
Manifestation à Nice, 1er février 2024 (image d'illustration).
Au vu de «tout ce qui a été annoncé», les deux syndicats majoritaires en France ont appelé jeudi à «suspendre» les blocages dans le pays, laissant entrevoir une sortie de crise même si la réaction d'autres organisations agricoles sera guettée de près.
A l'issue d'une journée qui a vu quelque 1 200 tracteurs converger dans la capitale européenne, la Commission a promis le 1er février des mesures pour défendre les «intérêts légitimes» des agriculteurs de l'UE, «en garantissant des conditions de concurrence équitables» ou en réduisant le «fardeau administratif» de la décriée politique agricole commune (PAC).
En première ligne, le président français Emmanuel Macron, qui participait ce jour à un sommet européen à Bruxelles consacré à l'aide à l'Ukraine, a réclamé une «force européenne de contrôle sanitaire et agricole» et appelé l'UE à davantage «protéger» le revenu des agriculteurs.
L'Elysée lâche du lest
Avec les nouvelles mesures dévoilées à Paris, son gouvernement a promis aux agriculteurs français une enveloppe de 400 millions d'euros depuis le début de la mobilisation lundi 29 février. L'exécutif français a également annoncé la mise « en pause» d'un plan de réduction des pesticides dans l'agriculture, au grand dam des organisations écologistes.
Blocage à Epône sur l'A13, le 1er février
Un contrôle, mais pas de blocage des céréales ukrainiennes
Paris a par ailleurs donné des gages au secteur en réitérant son opposition à la signature de l'accord controversé de libre-échange que la Commission négocie actuellement avec les pays sud-américains du Mercosur, dont le Brésil et l'Argentine, deux puissances agricoles.
Ce traité ne sera pas «conclu à la va-vite comme certains menaçaient de le faire», s'est engagé Macron, qui a également annoncé que l'UE instaurerait un contrôle des importations de céréales ukrainiennes pour éviter des distorsions de concurrence, sans pour autant les suspendre.
Les autorités ont fait état le 1er février au soir dans plusieurs départements de levées ou d'allègement de barrages, même si des blocages ponctuels persistent.
Bruxelles, cible de la colère agricole
Les quelque 150 tracteurs partis du Sud-Ouest pour faire entendre leur colère autour du marché international de produits frais de Rungis, au sud de Paris, ont, eux, rebroussé chemin face à la mobilisation des forces de l'ordre, qui leur ont barré le passage à l'aide notamment de véhicules blindés.
«On n'a pas obtenu ce qu'on voulait, mais à un moment donné quand vous avez les blindés tous les jours (...) Soit on les pousse et on va à l'affrontement - et on ne va pas le faire -, soit on reste tranquille et on fait demi-tour», a déclaré José Perez, coprésident de la Coordination rurale, un syndicat minoritaire, qui organisait ce convoi.
Dans tous les pays de l'UE, Bruxelles reste la cible désignée de la colère agricole. Politique européenne trop complexe, revenus trop bas, inflation, concurrence étrangère, accumulation de normes, flambée des prix du carburant : des revendications similaires se retrouvent aussi bien en Allemagne qu'en Pologne ou en Italie.
Pour faire entendre leurs griefs, des milliers de manifestants venus de plusieurs pays et quelque 1 200 tracteurs avaient envahi le 1er février les rues de la capitale belge. «Ce n'est pas l'Europe que nous voulons», «Sortons l'alimentation du libre échange», scandaient les manifestants en français, néerlandais, italien et allemand.
La mobilisation s'est étendue au Portugal où des centaines d'agriculteurs bloquaient des axes routiers, dont deux passages à la frontière avec l'Espagne, afin de réclamer une «valorisation de leur activité».
En Grèce, 300 tracteurs et des dizaines de camions d'apiculteurs, klaxonnant et arborant des drapeaux noirs et blancs, se sont immobilisés devant le centre municipal de Thessalonique, la deuxième ville de Grèce, aux cris de: «Agriculteurs, ils boivent votre sang».
Face à ce mouvement, la Commission avait déjà fait des concessions en début de semaine en proposant d'accorder pour 2024 une dérogation « partielle » aux obligations de mises en jachères imposées par la PAC.