France-Soir
Le barrage EDF de Sainte-Croix, dans la vallée de la Durance, le 22 août 2000.
AFP - Myriam Chaplain-Riou
La Chine a lancé le 19 juillet dernier la construction d'un méga-barrage au Tibet, sur le fleuve Yarlung Tsangpo. Annoncé par le Premier ministre Li Qiang comme le "projet du siècle", cet ouvrage titanesque devrait devenir le plus grand barrage hydraulique du monde d'ici dix ans. En aval du fleuve, l'Inde et le Bangladesh s'inquiètent d'un futur instrument de pression hydraulique.
Dans une région sismique et politiquement sensible, Pékin veut transformer le plateau tibétain en batterie géante. Ce barrage XXL — cinq centrales en cascade, 300 milliards de kWh annuels, 155 milliards d'euros — surpasse de loin les Trois Gorges. "Pour Pékin, c'est l'équivalent de la muraille de Chine au XXIe siècle", affirme Antonina Luszczykiewicz-Mendis, chercheuse à Oxford. Un projet érigé autant pour sa puissance symbolique que pour répondre à la soif énergétique de l'est chinois. Comme le rappelle France 24, la Chine a déjà construit 94 000 barrages, mais elle manque de nouveaux sites viables sur son territoire continental. Le Tibet, encore sous-exploité, devient une cible idéale.
Mais tout cela ne sera pas sans causer des dégâts. Déplacement de populations, destruction potentielle de lieux religieux et sinisation accélérée du Tibet sont autant de conséquences passées sous silence. Surtout, ce barrage inquiète New Delhi. "C'est une bombe à retardement", alerte Pema Khandu, dirigeant de l'Arunachal Pradesh. Le Brahmapoutre — nom du fleuve en Inde — est crucial pour l'irrigation, l'eau potable et l'agriculture. Or, la Chine n'a signé aucun accord de partage des eaux. "Ce barrage pourrait devenir une arme très dangereuse contre l'Inde", prévient Ashok Swain, professeur à l'université d'Uppsala.