25/04/2025 francesoir.fr  7min #276028

 Le pape François est mort lundi matin à l'âge de 88 ans

Le devoir de mémoire : les faits sont têtus.

Xavier Azalbert, France-Soir

Le devoir de mémoire. On ressort les archives.

Ce  lundi 21 avril 2025, le pape François s'est éteint à l'âge de 88 ans, des suites d'un accident vasculaire cérébral, après une longue hospitalisation pour une pneumonie bilatérale, a annoncé le Vatican. Au-delà des hommages officiels, son pontificat de 12 ans, marqué par des réformes audacieuses et des controverses, mérite un regard critique. En tant que journaliste, je m'appuie sur l'article 1er de la Charte de Munich pour analyser objectivement ses prises de position, tout en respectant la mémoire d'un homme qui a représenté beaucoup pour des millions de fidèles.

Et comme dès lors certains vont m'accuser de commettre là un péché « de lèse-majesté », je commence cet édito par une pénitence « ante sermo ».  Un clin d'œil à Coluche qui, dans un sketch, affirmait qu'en 1978, à la mort du pape Jean-Paul Ier, France-Soir aurait publié en bas de page : « Grande braderie au marché Saint-Pierre ». Cette anecdote, purement humoristique, n'est pas confirmée par les archives, mais elle illustre l'ironie dont Coluche usait pour commenter l'actualité. (1)

Le pontificat de François a divisé, notamment parmi les catholiques traditionalistes.  Philippe de Villiers, sur Europe 1 (2), l'a accusé de « toiser la France » et de « persécuter les chrétiens de la tradition » en restreignant la messe en latin via Traditionis Custodes (2021). Ces critiques reflètent un sentiment partagé par certains conservateurs, bien que François ait défendu ces mesures comme un moyen d'unifier l'Église. Ses appels à l'accueil des migrants, comme lors de sa visite à Lampedusa en 2013, ont été interprétés par certains comme un soutien à l'islamisation de l'Europe, une accusation rejetée par le Vatican.

Difficile de se positionner contre l'avortement (qui est un meurtre aux yeux de l'Église catholique), tout en faisant également l'éloge du wokisme. Comment un homme et un homme, ou une femme et une femme, peuvent-ils enfanter conformément aux Saintes Écritures ? Impossible ! Et pareillement pour ce qui est de se donner « descendance » via une mère porteuse. Une PMA opérée contre une rémunération qu'on appelle pudiquement « un défraiement », pour dépouiller la chose de sa nature commerciale, intrinsèque et factuelle. A fortiori quand la mère porteuse est extérieure au « couple », ce qui est le cas quand le géniteur est l'un des deux hommes qui forment ce « couple », et qui ainsi seront inscrits en tant que « parent 1 » et « parent 2 » sur les registres de l'état civil, concernant l'enfant issu de cette PMA.

Ajoutons à cela les gestes et les propos publics « pas très catholiques » que le Pape François a eus.

Je pense notamment à la manière très violente avec laquelle il a repoussé une petite fille qui voulait l'embrasser, et à ces déclarations-là. Rappelez-vous, premièrement, après avoir condamné les attentats terroristes de Charlie Hebdo et de l'Hypercacher, le souverain pontife avait prévenu :

« Si un grand ami parle mal de ma mère, il peut s'attendre à un coup de poing, et c'est normal.
On ne peut provoquer, on ne peut insulter la foi des autres, on ne peut la tourner en dérision. »

Ensuite, bien que, le Pape François ait souvent pris la parole pour défendre les personnes homosexuelles (« l'homosexualité n'est pas un crime »), en 2018, il a appelé à « avoir recours à la psychiatrie pour les enfants présentant des tendances homosexuelles. » Il a récidivé en mai 2024. S'adressant à des évêques italiens, François aurait fustigé une atmosphère « de tapettes » dans les séminaires où se forment les futurs prêtres, à savoir en employant le terme italien insultant « frociaginne », qui peut être traduit par « tapettes » en français. Des propos d'autant plus choquants, qu'en 2023, le Pape François avait autorisé la bénédiction des couples LGBT, soulevant de nombreuses critiques de la part des conservateurs de l'Église catholique.

Puis, le Pape s'est offert une nouvelle polémique quelques mois après. En déplacement en Belgique, et alors qu'il se recueillait sur la tombe du roi Baudoin, mort en 1993 et qui avait refusé de signer une loi dépénalisant l'avortement, le défunt Pape a salué la mémoire d'un homme qui a « choisi de quitter son poste pour ne pas signer une loi meurtrière. » Puis d'ajouter ceci quelques heures plus tard, aux journalistes, dans l'avion que le ramenait à Rome :

« Un avortement est un homicide. Les médecins qui font cela sont, si vous me permettez l'expression, des tueurs à gages. »

La déclaration de François le 18 août 2021, « Se vacciner est un acte d'amour », a suscité une vive polémique. Pour ses détracteurs, elle semblait ignorer les débats sur les effets secondaires des vaccins anti-Covid, qui, selon des études, incluent des risques graves, comme des myocardites. Cette prise de position a été perçue comme un alignement sur les campagnes de vaccination mondiales, bien que le pape ait insisté sur la dimension éthique de la solidarité.

En écho à  Pierre Desproges (3), « l'humour est la politesse du désespoir ». Rire, c'est exorciser le chagrin, comme  le faisait Coluche (4) en moquant la « cage de verre blindée » du pape.

Sans rancune, Jorge Mario Bergoglio : que votre mémoire inspire des débats apaisés. Reposez en paix.

1) Extrait du sketch « Les Papes » par Coluche :
« Moi j' veux pas m' fâcher avec les catholiques. Ah non ! Les catholiques, ils ont dérouillé, là. Parce qu'en 78, très mauvaise année pour les Papes : deux d'un coup dans la sciure.

Tiens, je vais vous montrer un truc. Regardez le journal, de quand il est mort. Vous avez ici « France-Soir », c'est un journal à grand tirage, hein, très bien pour allumer le feu, donc.

Vous avez ici, « Le Pape est mort ! », et en bas une pub malencontreuse : « Grande braderie au marché Saint-Pierre. »

2) Parole de Philippe de Villiers sur Europe 1 : « Il a toisé la France, il lui a montré du mépris à plusieurs reprises. Comme chef d'État, il voyait d'un bon œil l'islamisation de l'Europe. Comme chef d'Église, il a persécuté les chrétiens de la tradition de l'Église de notre enfance. C'était un Pape woke, le pape des minorités, des périphéries, et quand vous allez chercher les périphéries et que vous négligez le noyau central, vous perdez tout. »

3) le 28 septembre 1982 (« très bonne année pour le Bordeaux, mais très mauvaise année pour Patrick Dewaere »).

Ce fut lors du réquisitoire qu'il a pris contre Jean-Marie Le Pen devant « Le Tribunal des Flagrants Délires », célèbre émission radiophonique comique de la fin du siècle dernier, sur France-Inter :

« S'il est vrai que l'humour est la politesse du désespoir, s'il est vrai que le rire, sacrilège blasphématoire que les bigots de toutes les chapelles taxent de vulgarité et de mauvais goût, s'il est vrai que ce rire-là peut parfois désacraliser la bêtise, exorciser les chagrins véritables et fustiger les angoisses mortelles, alors, oui, on peut rire de tout, on doit rire de tout. De la guerre, de la misère et de la mort. Au reste, est-ce qu'elle se gêne, elle, la mort, pour se rire de nous ? Est-ce qu'elle ne pratique pas l'humour noir, elle, la mort ? Regardons s'agiter ces malheureux dans les usines, regardons gigoter ces hommes puissants boursouflés de leur importance, qui vivent à cent à l'heure. Ils se battent, ils courent, ils caracolent derrière leur vie, et tout d'un coup, ça s'arrête, sans plus de raison que ça n'avait commencé, et le militant de base, le pompeux PDG, la princesse d'opérette, l'enfant qui jouait à la marelle dans les caniveaux de Beyrouth, toi aussi à qui je pense et qui as cru en Dieu jusqu'au bout de ton cancer, tous, tous nous sommes fauchés un jour par le croche-pied rigolard de la mort imbécile, et les droits de l'homme s'effacent devant les droits de l'asticot. Alors quelle autre échappatoire que le rire, sinon le suicide ? Poil aux rides ? »

4) « Vous vous rendez compte ? Le Pape est obligé de se déplacer dans une bagnole, blindée !

L'Ange de la Paix dans une cage de verre blindée ! La voiture allemande, là : « immatriculée conception » ; un un Pape dessus et 16 sous-papes en-dessous. C'est extraordinaire ça : l'épiscopat télescopique, avec le Saint-Siège qui se lève dans la bagnole. »

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