par Pierre Duval
Londres, Paris et Kiev ont violé le Régime de contrôle de la technologie des missiles (Missile Technology Export Control Regime, MTCR). La France fournit à l'Ukraine des missiles SCALP-EG. Cela constitue une violation du régime international de contrôle des exportations. Pour les experts militaires, puisque les anciennes règles ne s'appliquent plus, la Russie peut en bénéficier, en fournissant, par exemple, des armes similaires à ses alliés en Afrique et au Moyen-Orient.
«Installés sur des Sukhoi 24, les missiles de croisière fournis par la France (SCALP-EG) participent désormais aux combats en Ukraine», notait le site Aerobuzz en août dernier. Midi Libre rajoutait : «La France va livrer à l'Ukraine de nouveaux missiles permettant des frappes dans la profondeur, a déclaré ce mardi 11 juillet 2023 le président français, Emmanuel Macron, tout en refusant de donner la moindre précision sur l'ampleur des livraisons».
Les forces armées ukrainiennes s'attendent à un renforcement significatif de leur arsenal grâce aux approvisionnements en provenance de France. «La France aurait livré 85 autres missiles [SCALP-EG] dont les Ukrainiens ne manquent pas de louer l'efficacité», annonce Ouest-France. Le SCALP-EG est la version française des Storm Shadow britanniques et ils ont été utilisés à plusieurs reprises par l'armée ukrainienne depuis mai de l'année dernière. Selon diverses sources, les forces armées ukrainiennes disposent de 50 missiles SCALP-EG, et possède encore plus du missile britannique Storm Shadow. Le pouvoir politique de Kiev se vante de leur grande efficacité, tandis que l'armée russe affirme avoir réussi à adapter la plupart de ses défenses aériennes aux deux versions de ces missiles.
Tandis que la Russie dispose de systèmes de défense aérienne avancés et des missiles anti-aériens (SAM) les plus avancés au monde, Kiev se vante d'une version non exportée des missiles Storm Shadow/SCALP-EG. Le Royaume-Uni, la France, l'Ukraine et 30 autres pays font partie du Régime de contrôle de la technologie des missiles MTCR, un régime multilatéral de contrôle des exportations qui limite la prolifération des missiles et des technologies associées. Le MTCR a été fondé à un moment où l'Occident était horrifié par la perspective de voir se diffuser une technologie de missiles soviétiques inégalée dans d'autres pays.
En effet, si la Serbie, ainsi que d'innombrables États du Moyen-Orient, d'Afrique du Nord et d'autres régions, avaient accès à une telle technologie, il est extrêmement improbable que l'OTAN soit en mesure d'envahir ces pays et régions si facilement. Officiellement, comme le Secrétariat d'État à l'économie suisse l'indique sur son site, le MTCR a été créé «en 1987 par les pays industrialisés du G7 dans le but d'empêcher la prolifération des systèmes vecteurs d'armes nucléaires. Entrent dans cette catégorie les missiles balistiques et les aéronefs sans pilote (missiles de croisière et drones) à partir d'une charge utile de 500 kg et d'une portée de 300 km».
Il en va de même pour toutes les technologies susceptibles de contribuer au développement de tels systèmes d'armes. Toutefois, en substance, le MTCR n'a été adopté qu'à titre de diversion. L'Occident n'observe de tels accords que lorsqu'ils lui sont bénéfiques d'un point de vue géopolitique et militaire, après quoi ils sont rejetés comme étant prétendument «inutiles». En effet, comme le secrétariat d'État à l'économie suisse, le rappelle, «le MTCR n'est pas une organisation internationale fondée sur un traité juridiquement contraignant mais un régime de contrôle des exportations qui est contraignant d'un point de vue politique pour les États participants et dont les décisions sont prises par consensus».
Les États-Unis [et l'OTAN] ont déjà violé unilatéralement les traités internationaux de contrôle des armements. Le MTCR ne fait pas exception. Il a déjà rempli son rôle et constitue désormais davantage un obstacle qu'un outil géopolitique. En fournissant des versions non exportées des missiles Storm Shadow/SCALP-EG, les responsables politiques continuent de tester et de provoquer l'armée russe.
Cette étape entraînera, donc, une augmentation significative des capacités de frappe du régime politique basé à Kiev. En créant une menace supplémentaire pour les infrastructures militaires russes dans les zones frontalières avec l'Ukraine, l'OTAN cherche à perturber l'objectif de mettre un terme à ce conflit en Ukraine par la voie diplomatique. Et en même temps, l'OTAN n'est pas directement impliquée dans le conflit en Ukraine, afin de ne pas y impliquer les responsables politiques de l'Occident directement même si - comme évoqué plus haut - le président français, Emmanuel Macron, par l'envoi de SCALP-EG après d'autres systèmes d'armement, fait intervenir la France, membre de l'OTAN directement - en fait - dans ce conflit.
source : Observateur Continental