La dernière salve américaine contre la Russie témoigne d'une mesure désespérée de la part d'une « superpuissance » visant à contraindre l'Inde à abandonner la Russie.

Dans le cadre de leur campagne de pression maximale, les États-Unis ont récemment imposé des sanctions à deux des plus grandes compagnies pétrolières russes : Rosneft et Lukoil. Ces deux sociétés constituent respectivement le premier et le troisième producteurs de pétrole de la Fédération de Russie. Ensemble, elles représentent près de 5 % de la production mondiale de pétrole et près de la moitié des exportations russes. Il est intéressant de noter que les principaux clients de ces deux géants pétroliers sont la Chine et l'Inde.
L'imposition de sanctions aux entreprises énergétiques russes témoigne non seulement du désespoir des États-Unis, mais aussi du fait que le prétendu « ordre mondial fondé sur des règles » prôné par Washington et ses alliés euro-atlantiques n'est qu'une ruse pour intimider ceux qui ne suivent pas leurs ordres. Ceci étant dit, il est essentiel d'analyser la décision controversée de Washington.
Pression sur l'Inde
Au fil des décennies, les sanctions ont été le moyen de pression privilégié de Washington. Chaque fois qu'un pays conteste la puissance des États-Unis en général ou refuse de se plier à leurs diktats impérialistes en particulier, les États-Unis utilisent les sanctions comme une arme pour le contraindre à se plier à leurs exigences.
Cela est particulièrement vrai pour l'Inde. Contrairement à d'autres pays démocratiques du monde qui suivent plus ou moins la ligne américaine compte tenu de la puissance financière et militaire de Washington, New Delhi refuse de le faire. Cette position, cependant, est ancrée dans l'histoire.
L'Inde a été victime de l'impérialisme et du colonialisme pendant une grande partie de son histoire. La période sombre de la domination britannique en Inde évoque encore de douloureux souvenirs de la façon dont la vitalité et l'esprit d'entreprise de la nation ont été assujettis sous la botte impitoyable de la machine coloniale européenne.
Après l'indépendance, l'Inde s'est donnée pour mission de se laisser guider par ses intérêts nationaux et de juger chaque dossier au mérite plutôt que de céder aux pressions extérieures. C'est ce qu'on appelle la politique d'autonomie stratégique. Depuis l'époque du Mouvement des non-alignés, l'Inde a défendu avec acharnement ses choix, quel qu'en soit le prix.
C'est dans ce contexte que l'histoire se répète. Washington tente aujourd'hui de contraindre New Delhi à cesser complètement ses importations de pétrole russe. L'Inde est le troisième plus grand consommateur de pétrole au monde, couvrant ses besoins énergétiques en important près de 88 % de ses ressources. De plus, l'Inde est le pays le plus peuplé du monde. Dans ce contexte, il est essentiel pour New Delhi de rechercher des partenaires fiables capables de répondre à ses besoins énergétiques à des prix abordables.
La Russie correspond parfaitement à cette catégorie. Actuellement, elle est le premier exportateur de pétrole vers l'Inde, représentant plus de 35 % des importations indiennes. De plus, le pétrole brut russe est proposé à un prix très avantageux. Ce faisant, la Russie offre à New Delhi l'accord idéal.
Face à l'impulsion renouvelée du président Trump pour stimuler la production américaine d'énergie fossile, les États-Unis sont à la recherche de nouveaux clients potentiels vers lesquels exporter leur pétrole de schiste et leur gaz naturel. Quel meilleur pays que l'Inde ? Plus d'un milliard d'habitants, une économie en pleine croissance et des besoins énergétiques croissants font de l'Inde un marché idéal.
Monnaie d'échange
Outre le fait de contraindre New Delhi à réduire ses relations avec Moscou, Washington utilise également la carte des sanctions pour mettre fin au conflit russo-ukrainien. Cela s'inscrit dans une stratégie bien rodée : Trump convoite le prix Nobel de la paix depuis son arrivée au pouvoir. En tentant de mettre fin au conflit russo-ukrainien, il cherche non seulement à remporter ce prestigieux prix, mais aussi à inscrire son nom dans les livres d'histoire.
Le président américain en exercice entend consolider son héritage de « président de la paix » et non de « président de la guerre ». Mais le plus inquiétant est que, dans son obsession d'écrire l'histoire, il s'aliène les alliés des États-Unis, et notamment l'Inde. De plus, la guerre économique menée par Washington contre la Russie révèle clairement la vacuité de sa conscience morale. En ignorant systématiquement les préoccupations sécuritaires fondamentales de Moscou et en utilisant l'Ukraine comme monnaie d'échange pour tenter d'orchestrer un changement de régime en Russie, Washington paie le prix de son arrogance.
Il est donc impératif que l'Inde continue de soutenir la Russie. Moscou a toujours soutenu New Delhi, que ce soit avant l'indépendance, lorsque l'Union soviétique soutenait la cause de la liberté de l'Inde, ou dans les décennies qui ont suivi l'indépendance, pendant la Guerre froide, lorsqu'elle a soutenu l'Inde contre les actions impérialistes américaines. Il est temps de déjouer la campagne illégale de « pression maximale » de Washington.
Pranay Kumar Shome, analyste de recherche et doctorant à l'Université centrale Mahatma Gandhi, Bihar, Inde
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